Hasard et victoire

Connaissez-vous le poker menteur ?

Rodenbach dit :Tout ça pour dire que l'incertitude d'un lancer de dé ce n'est pas équivalent à l'incertitude d'un adversaire. Cette dernière est à la fois cernable et influençable, ce qui fait par ailleurs le sel des jeux de bluff, guessing et programmation.
Cette différence est pourtant loin d'être acquise par tour les joueurs, en témoignent les nombreux avis négatifs portant sur les jeux de bluff (skull en tête) qui les ramènent à des jeux de hasard.

Toutafé. 

Rodenbach dit :Tout ça pour dire que l'incertitude d'un lancer de dé ce n'est pas équivalent à l'incertitude d'un adversaire. Cette dernière est à la fois cernable et influençable, ce qui fait par ailleurs le sel des jeux de bluff, guessing et programmation.

Bon je vais remettre un euro dans la machine, juste parce que je ne te suis pas là-dessus.

L'incertitude lié à un lancé de dé, elle s'anticipe également. L'ensemble des résultats est connu par avance. Tu peux le faire avant de lancer le dé en influençant l'effet du lancé dans bien des jeux : par exemple à Roots, tu mets plus de gars pour que les 2 et 3 fassent plus mal. Tu peux le faire avec les probabilités sur le résultat du dé (exemple sur 3D6 il est peu probable d'avoir un 3, sur un dé spécial comme celui de Small World il y a beaucoup de face 0...etc). Tu peux le faire en anticipant ton comportement en fonction des résultats : si j'ai tel résultat, je ferai ça, tel autre ça...etc. Ce qui fait que dé ou pas tu as toujours quelque chose à faire. Tu peux le faire en te donnant des marges de manoeuvre pour être en capacité de réagir si le résultat attendu n'est pas le bon : je tente ça, si cela ne passe pas, je me garde ça sous le coude (comme dans plein de wargames).

Strictement du point de vue du sujet, l'incertitude lié à l'adversaire et celle lié aux dés revient à gérer de l'incertitude. Je comprends la disctinction sur le plan physique mais je ne comprends pas en quoi pour le joueur ce n'est finalement pas dans le deux cas de l'incertitude à gérer.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Classification_des_jeux#Classification_des_jeux_%C3%A0_plusieurs_joueurs_o%C3%B9_n’entre_pas_%C2%AB_l’habilet%C3%A9_physique_%C2%BB

Vous pouvez partir de ca et rajouter ou modifier ou complexifier des colonnes peut etre ?

XavO dit :(...)
Strictement du point de vue du sujet, l'incertitude lié à l'adversaire et celle lié aux dés revient à gérer de l'incertitude. Je comprends la disctinction sur le plan physique mais je ne comprends pas en quoi pour le joueur ce n'est finalement pas dans le deux cas de l'incertitude à gérer.  

Oui et non.

Concernant "l'incertitude de l'adversaire", tu peux partir du principe qu'il jouera le meilleur coup disponible pour lui, car il cherchera a optimiser son score. Il y a donc un comportement qui fait que l'adversaire, s'il rencontre plusieurs fois la même situation sur plusieurs parties successives, devrait réagir de façon plus où moins équivalente (je ne dis pas qu'il fera a chaque fois le même coup, mais en choisira un qui créera un maximum différentiel de points avec son ou ses adversaires).
A l'inverse, un événement aléatoire lié au jeu pourra varier énormément, et même si tu connais la répartition des probabilités, tu n'es pas à l'abri de cas extrême.

Après, sur certains jeux relativement interactif et/ou avec 3 joueurs ou parfois beaucoup plus, il est effectivement impossible de réellement prévoir le comportement des joueurs, tellement chaotique qu'il peut se rapprocher en perception d'un hasard.
Pour ma part typiquement Shadow Hunter, en l'absence d'information sur une cible potentielle, parfois je tape et parfois non, et effectivement là du point de vue d'un autre joueur, ça équivaut à du hasard.

Mais par exemple, sur un jeu type "échecs", le fait de ne pas savoir à l'avance le coup de l'adversaire, ce n'est pas de l'incertitude. C'est au contraire du calcul (ou de l'apprentissage) pour dans une situation donnée, trouver un coup qui est pertinent quelque soit le coup joué en réponse par l'adversaire.
Si l'adversaire dispose d'un coup qui réfute ton premier mouvement, ce n'est pas du hasard c'est qu'il a mieux joué que toi (ou alors que le jeu est mal conçu si l'adversaire à toujours un moyen simple de gagner quelque soit tes coups, ou que vous être tous les deux des génies qui avaient résolu un jeu ultra compliqué et profond).
Si les deux joueurs jouent toujours de la même façon, ils arriveront toujours au même résultat, qui dépend uniquement de leur action.

A l'inverse, les événements lié au hasard du jeu peuvent (selon les jeux toujours) changer le résultat d'une partie et avantager un joueur sans que celui ci n'adapte ses actions. Si par exemple tu pioches des jetons points de victoire au hasard allant de 2 à 8 points, celui qui tombe sur le 8 est avantagé par rapport à celui qui tombe sur le 2, et la seule façon de gérer ça pour le joueur c'est d'avoir une marge d'avance au score en étant meilleur, il n'y a pas d'adaptation possible.

Dans le cas théorique irréaliste où tous les joueurs jouent parfaitement bien et optimisés, on peut presque considérer que l'incertitude lié aux joueurs n'existe pas, vu qu'ils jouent toujours 'le meilleur' coup : ils suivent un comportement qui permet d'anticiper de façon sûre leur coup. Alors que le hasard du jeu, même avec des probabilité qui pondèrent les scénarios, tu ne peux jamais être "sûr" du résultat, sauf à avoir été largement meilleur et avoir réussi à faire en sorte que toutes les possibilités mènent à ta victoire.
En pratique, en tant que joueur on est loiiiiiiiin de ça (et tant mieux ! ), donc on joue souvent des coups absurdes et douteux dont la logique n'appartient qu'à nous, et qui du point de vue des autres joueurs peut sembler être du hasard. Mais selon les configurations (nombre de joueur surtout) et les jeux, cet aspect peut être plus ou moins grand, alors que le hasard du jeu reste toujours le hasard. Il me semble donc pas pertinent de faire d'amalgame entre les deux.

 

Évidemment qu’on ne joue pas au hasard!

Quand tu joues en équipe, que ton partenaire dispose de certaines informations (dont certaines que tu lui as données par ton jeu) et qu’il joue autre chose que ce que tu attends, et qu’il te dit qu’il a joué ça comme il aurait joué autre chose, là tu comprends que le hasard , donc que tu ne maitrises pas, ça peut être frustrant.

Apres, au-delà du meilleur coup (parmi ceux qu’on a vus), il y a aussi une part de moins prévisible,lié à
- la créativité, dans les jeux avec beaucoup de liberté : sport collectif, jeux avec des mots, dextérité…
- le bluff
- la prise de risque ou au contraire le jeu sûr
*** selon le score et mon amour du risque , entre un coup qui rapporte 5 et un autre qui rapporte entre 1 et 10, je choisirais l’un ou l’autre. Aucun des deux n’est meilleur.
Au dernier coup, si je 3e à 6 points du 1er et 3 points du 2e
- pour viser la victoire, choisir le coup qui rapporte entre 1 est 10 est le meilleur coup
- si finir 2eme m’assure une qualification pour le tour suivant du tournoi, le coup à 5 est le meilleur coup
​​

Le sujet du hasard a souvent été discuté dans le podcast ludology, et ils differencient 2 types de hasard:

- le hasard en sortie: on choisit une action et on lance des dés pour la realiser.
- le hasard en entrée : on lance des dés et on choisit son action.
Le ressenti des joueurs n’est pas du tout le même face à ces 2 sortes de hasard.
Le premier cas n’est pas très compétitif, mais génère une tension et une surprise qui peut être très ludique (ex: talisman, le lancé de dé de Docky), le deuxième est plus compétitif, il permet de varier les parties et obligent les joueurs à s’adapter (ex: le draft de dés de la Granja, le tirage/draft de Res Arcana).
 
Dans les échanges précédents les 2 types de hasards sont mentionnés sans forcementy les différencier.
 
On peut aussi parler du hasard comme d’un risque associé à un gain. Plus le risque est important, plus la récompense devrait être intéressante. Dans cette situation, un joueur mené au score devrait prendre l’action la plus risquée, en espérant rattraper le premier joueur. Alors que le joueur en tête à plutôt intérêt à jouer de façon moins risquée. Le hasard peut donc aussi être une manière d’equibrer un jeu.
 
Et pour revenir au sujet de départ sur des joueurs de niveaux équivalents: un bon jeu est capable de fournir de nouveaux défis aux joueurs à chaque partie (grâce au hasard en entrée), et les joueurs sont donc amenés à s’adapter et explorer de nouveaux “chemins”.
Des joueurs “de même niveau” pourront choisir des chemins completement différents selon ce qui leur semble optimal en fonction de l’état de la partie et de leur expérience dans le jeu. Le résultat de la partie dira qui a fait le meilleur choix.
Et si le niveau des joueurs est tel que ce meilleur choix devient une certitude, alors il faut jouer à un autre jeu :slight_smile:
 

Buiss dit :Le sujet du hasard a souvent été discuté dans le podcast ludology, et ils differencient 2 types de hasard:
- le hasard en sortie: on choisit une action et on lance des dés pour la realiser.
- le hasard en entrée : on lance des dés et on choisit son action.
Le ressenti des joueurs n'est pas du tout le même face à ces 2 sortes de hasard.
Le premier cas n'est pas très compétitif, mais génère une tension et une surprise qui peut être très ludique (ex: talisman, le lancé de dé de Docky), le deuxième est plus compétitif, il permet de varier les parties et obligent les joueurs à s'adapter (ex: le draft de dés de la Granja, le tirage/draft de Res Arcana).
 
Dans les échanges précédents les 2 types de hasards sont mentionnés sans forcementy les différencier.
 
On peut aussi parler du hasard comme d'un risque associé à un gain. Plus le risque est important, plus la récompense devrait être intéressante. Dans cette situation, un joueur mené au score devrait prendre l'action la plus risquée, en espérant rattraper le premier joueur. Alors que le joueur en tête à plutôt intérêt à jouer de façon moins risquée. Le hasard peut donc aussi être une manière d'equibrer un jeu.
 
Et pour revenir au sujet de départ sur des joueurs de niveaux équivalents: un bon jeu est capable de fournir de nouveaux défis aux joueurs à chaque partie (grâce au hasard en entrée), et les joueurs sont donc amenés à s'adapter et explorer de nouveaux "chemins".
Des joueurs "de même niveau" pourront choisir des chemins completement différents selon ce qui leur semble optimal en fonction de l'état de la partie et de leur expérience dans le jeu. Le résultat de la partie dira qui a fait le meilleur choix.
Et si le niveau des joueurs est tel que ce meilleur choix devient une certitude, alors il faut jouer à un autre jeu :)
 

Par exemple, éviter une passe au milieu de terrain à 1mn de la fin? 🤔

Buiss dit :
Des joueurs "de même niveau" pourront choisir des chemins completement différents selon ce qui leur semble optimal en fonction de l'état de la partie et de leur expérience dans le jeu. Le résultat de la partie dira qui a fait le meilleur choix.

Justement, pas nécessairement ! :)

Il est possible de perdre en ayant fait les meilleurs choix théoriques (ou en tout cas des choix meilleurs que ceux des adversaires).

Typiquement sur Res Arcana, je peux gagner en ayant légèrement moins bien joué cette partie que mon adversaire (j'ai pas réussi à optimiser mes ressources, j'aurais pu gagner un tour plus tôt en jouant mieux, etc.) parce que j'avais un meilleur deck / main de départ.


La notion de hasard en entrée et sortie et surtout la perception de ces hasards par les joueurs est intéressante.

Mais souvent, dans les jeux que je pratique, on se retrouve dans une sorte de situation hybride :
 - à chaque début de tour, un "hasard en entrée" auquel il faut s'adatper
 - cependant, le "hasard en entrée" du tour N+1 devient en quelque sorte le "hasard en sortie" du tour N, car mes possibilités d'adaptation au tour N+1 dépendent bien souvent de ce que j'ai réalisé au tour N (et avant).

 

J’ai effectivement le même ressenti à Res Arcana, c’est pour ça que je n’enchaine pas les parties. Mais c’est peut être juste que je n’ai pas encore trouvé comment optimiser toutes les cartes.

Et 100% d’accord sur le côté hybride du hasard entrée/sortie, ce sont plus des concepts théoriques. Quoique le lancé de dés pour désigner le vainqueur existe bien dans certains jeux :slight_smile:

MasterMindM dit :
 - cependant, le "hasard en entrée" du tour N+1 devient en quelque sorte le "hasard en sortie" du tour N, car mes possibilités d'adaptation au tour N+1 dépendent bien souvent de ce que j'ai réalisé au tour N (et avant).

 

complètement d'accord, j'aime bien cette approche . J'ai toujours trouvé surévalué l'approche des jeux à hasard entrant (par rapport aux autres) et ce faux argument de "tout le monde doit s'adapter au même tirage" . Car , à part le début de jeu (et encore), les tirages sont toujours plutôt en faveur de la stratégie de joueur par rapport à un autre (parfois de manière légère , mais parfois de manière bien plus importante).

Et pour revenir rapidement sur hasard et loi physique , il n'y a pas vraiment grand chose de prédictif à l'échelle humaine. Même un simple lancée de dé. A la rigueur , avec un dé virtuel, ça doit être possible par programme de déterminer le résultat (et encore avec un lancer simple genre le dé tombe sans rotation initiale). Je passe résultat exact, pas résultat probable par un enchainement de simulations. Mais avec un vrai dé, il y a tout un tas de micro paramètres qui font que c'est infaisable (dé jamais parfaitement équilibré, impact du support par son irrégularité et sa résistance ... ). 

Navré je ne peut pas répondre a cette question car je ne connais pas de jeu sans hasard.

ocelau dit :
MasterMindM dit :
 - cependant, le "hasard en entrée" du tour N+1 devient en quelque sorte le "hasard en sortie" du tour N, car mes possibilités d'adaptation au tour N+1 dépendent bien souvent de ce que j'ai réalisé au tour N (et avant).

 

Car , à part le début de jeu (et encore), les tirages sont toujours plutôt en faveur de la stratégie de joueur par rapport à un autre (parfois de manière légère , mais parfois de manière bien plus importante).

Ça me fait penser au système de points sur BGA, basé sur Elo, qui 
- n'est pas adapté pour les jeux par équipe (la composition des équipes, c'est un hasard essentiel!)
- n'est pas adapté au coop (même remarque)
- ne tient pas compte du rôle du hasard dans les points.
Alors que, vu le nombre de parties, il serait possible de faire des duplicates et donc ajuster le nombre de points en fonction de celui des concurrents disposant du même jeu.

Fraisdeau dit :
ocelau dit :
MasterMindM dit :
 - cependant, le "hasard en entrée" du tour N+1 devient en quelque sorte le "hasard en sortie" du tour N, car mes possibilités d'adaptation au tour N+1 dépendent bien souvent de ce que j'ai réalisé au tour N (et avant).

 

Car , à part le début de jeu (et encore), les tirages sont toujours plutôt en faveur de la stratégie de joueur par rapport à un autre (parfois de manière légère , mais parfois de manière bien plus importante).

Ça me fait penser au système de points sur BGA, basé sur Elo, qui 
- n'est pas adapté pour les jeux par équipe (la composition des équipes, c'est un hasard essentiel!)
- n'est pas adapté au coop (même remarque)
- ne tient pas compte du rôle du hasard dans les points.
Alors que, vu le nombre de parties, il serait possible de faire des duplicates et donc ajuster le nombre de points en fonction de celui des concurrents disposant du même jeu.

Je ne vois pas forcément d'interférence entre un classement ELO et un jeu de hasard (on parle de jeu à hasard gérable). Sauf cas particuliers, sur un tel jeu le meilleurs va gagner. Dans le classement ELO il n'y a pas de notion de condition, c'est un principe de points gagnés/perdus par rapport à un différentiel de niveau de l'adversaire.

Inversement, sur un jeu sans hasard, non coop, sans équipe, il y a toujours des facteurs similaire au hasard : l'état de fatigue, l'engagement/l'investissement. Et puis les adversaires , on peut très bien battre un adversaire sur le papier plus fort "simplement" parce qu'on a un style de jeu qui le permet par rapport au sien (et inversement).
Et enfin pour revenir au cas du jeu de société, il y a le cas où on est hors duel. On peut perdre face à un adversaire parce qu'un troisième a joué une stratégie qui venait nous gêner plus que l'autre (je ne parle pas de kingmaking d'ailleurs ce 3ème joueur est peut-être le gagnant de la partie).

Le duplicate, sur le papier ça peut être intéressant pour la compétition avec des jeux de hasard. Mais concrètement je le vois applicable que dans les jeux à hasard de mise en place. Même un jeu comme Res Arcana qui se prête bien à un match aller-retour n'est pas parfait, car malgré des decks identiques on n'aura pas forcément la même main de départ. 

 

MasterMindM dit :
En pratique, en tant que joueur on est loiiiiiiiin de ça (et tant mieux ! ), donc on joue souvent des coups absurdes et douteux dont la logique n'appartient qu'à nous, et qui du point de vue des autres joueurs peut sembler être du hasard. Mais selon les configurations (nombre de joueur surtout) et les jeux, cet aspect peut être plus ou moins grand, alors que le hasard du jeu reste toujours le hasard. Il me semble donc pas pertinent de faire d'amalgame entre les deux.

 

J'aime beaucoup "absurdes et douteux dont la logique n'appartient qu'à nous" laugh

A force de vous lire, je suis complétement d'accord sur le fait que l'incertitude liée au hasard du jeu et l'incertitude lié au comportement de l'adversaire ne sont pas de même nature. Du coup, je suis complétement d'accord sur l'idée que l'amalgame que j'ai fait dans mon premier message est abusif.

Je reste sceptique sur le fait que du point de vue de l'activité du joueur, cela ne se résume pas à gérer de l'incertitude. Duflo explique que l'activité de jeu est une économie du risque : le joueur passe son temps - non pas à optimiser ses coups - mais à optimiser son plaisir. Celui-ci étant sur le plan ludique (le jeu a d'autres dimensions offrant du plaisir : narrative, sociale...) proportionnel à un rapport entre risque et compétence. L'idée est que si l'on arrive à surmonter un défi important par rapport à notre compétence, on se fera plus plaisir que si le défi est trivial pour nous. L'auteur explique ainsi que l'on peut volontairement se mettre en danger pour majorer son plaisir (par exemple face à un adversaire plus faible). Le risque et l'incertitude sont deux concepts très liés : gérer son risque, c'est gérer son incertitude, la baliser, la réduire, la maitriser.


PS : de mon côté j'a un "bagage" de psycho-ergonomie : j'ai appris à adopter le point de vue du sujet et je me situe quasiment par réflexe du point de vue de l'activité humaine (ce que fait l'individu, ce qu'il pense...etc). Ce qui peut expliquer (avec l'âge... laugh) ma difficulté à percuter face à certains arguments (comme ceux issus de la physique...) et donner l'impression que j'y mette de la mauvaise volonté. Ce n'est vraiment pas le cas. 

Buiss dit :Le sujet du hasard a souvent été discuté dans le podcast ludology, et ils differencient 2 types de hasard:
- le hasard en sortie: on choisit une action et on lance des dés pour la realiser.
- le hasard en entrée : on lance des dés et on choisit son action.
Le ressenti des joueurs n'est pas du tout le même face à ces 2 sortes de hasard.
Le premier cas n'est pas très compétitif, mais génère une tension et une surprise qui peut être très ludique (ex: talisman, le lancé de dé de Docky), le deuxième est plus compétitif, il permet de varier les parties et obligent les joueurs à s'adapter (ex: le draft de dés de la Granja, le tirage/draft de Res Arcana).
 
Si tu prends le poker, imagine un coup joué entre deux joueurs qui partent à tapis à la turn. Les décisions ont été prises avant et c'est le tirage la dernière carte qui va déterminer le vainqueur du coup. Un peu comme un lancer de dés. On serait donc dans le premier cas. Pourtant dire que du coup le poker ne serait pas très compétitif serait un non-sens total.
Je ne connais pas Ludology mais cette différenciation entre hasard en entrée ou en sortie ne me semble pas avoir beaucoup de sens, d'ailleurs c'est bien la première fois que j'entends ces termes. Enfin que ce soit perçu différemment par certains joueurs superstitieux je peux le concevoir mais c'est juste une perception et une mauvaise compréhension du hasard.
D'ailleurs la présence de hasard ou non n'a pas vraiment de rapport avec l'aspect compétitif d'un jeu. Dans tous les cas les meilleurs joueurs gagneront plus souvent que les joueurs moins forts, et ce qu'il y ait beaucoup de hasard ou non. Mais être un meilleur joueur ça veut juste dire ça, gagner plus souvent qu'un joueur moins fort et non pas gagner 100% du temps.
M.Jack dit :Je ne connais pas Ludology mais cette différenciation entre hasard en entrée ou en sortie ne me semble pas avoir beaucoup de sens, d'ailleurs c'est bien la première fois que j'entends ces termes. Enfin que ce soit perçu différemment par certains joueurs superstitieux je peux le concevoir mais c'est juste une perception et une mauvaise compréhension du hasard.
il y a quand même une différence : hasard entrant c'est que tu as des éléments hasardeux qui t'arrives avant de prendre ta décision. Le hasard sortant c'est que tu as le hasard qui intervient après tes choix , typiquement un jet de réussite.

Exemple tu fais un combat avec D6, tu gagnes à 5+ :
- règle hasard entrant : tu lances d'abord le dés, tu vois que tu fais 1, tu ajoutes un laser force 3  et un laser force 1 (ou une épée ça dépend du thème laugh )
- règle hasard sortant : vaisseau inconnu. Tu te dis qu'avec un laser force 3 ça passe. Pas de bol tu fais 1 . Perdu

( j'ai l'impression d'être en train d'expliquer la différence entre le bon hasard et le mauvais hasard  )

après il y a ceux qui du coup caricature et vont estimer que dans le premier cas on maitrise sa possibilité de gagner alors que dans le second c'est complètement au hasard. C'est un peu plus fin que ça.

En fait en dressant cet exemple je me rends compte qu'on est dans les 2 cas dans de la gestion de risque. Sauf que dans le premier c'est l'aspect plaisir de gestion qui prévaut, dans le second c'est l'excitation du risque 
M.Jack dit a propos du hasard "en entrée" et "en sortie" : Si tu prends le poker, imagine un coup joué entre deux joueurs qui partent à tapis à la turn. Les décisions ont été prises avant et c'est le tirage la dernière carte qui va déterminer le vainqueur du coup. Un peu comme un lancer de dés. On serait donc dans le premier cas (ndlr : hasard en sortie). Pourtant dire que du coup le poker ne serait pas très compétitif serait un non-sens total.

Il ne faut pas voir les deux types de hasards comme incompatibles dans le même jeu.

Je ne suis pas un spécialiste du poker, mais a priori si la dernière carte est bien du hasard "en sortie", a priori avant de faire tapis les joueurs avaient déjà eu du hasard "en entrée" : main de départ, les premières cartes retournées, les mises précédentes des joueurs.
Le fait qu'il y est un hasard "en sortie" existant ne veut pas dire que tout dépend de lui.

Je pense qu'il faut plutôt voir ça comme une échelle de 0 à 100 et pas comme une catégorisation binaire.
Mais globalement, pour être compétitif il faut a priori pour le jeu qu'ils puissent exister des compétences qui permettent une régularité des résultats. Or pour que les compétences puissent s'exprimer, il faut que le jeu en donne les moyens, et ça semble effectivement plus facile (de façon globale, des contre exemple existent surement avec des mécaniques spécifiques) si on peut réagir APRES avoir eu de l'information et ne pas pas prendre tout ou partie de ses décisions à l'aveugle.

 

M.Jack dit :D'ailleurs la présence de hasard ou non n'a pas vraiment de rapport avec l'aspect compétitif d'un jeu. Dans tous les cas les meilleurs joueurs gagneront plus souvent que les joueurs moins forts, et ce qu'il y ait beaucoup de hasard ou non. Mais être un meilleur joueur ça veut juste dire ça, gagner plus souvent qu'un joueur moins fort et non pas gagner 100% du temps. 


Encore une fois, je pense qu'il faut voir ça comme un curseur qui se situe entre le 100% hasard (jeu de l'oie) et le 0% hasard.
Et Effectivement, dans une définition stricte, je suis d'accord avec toi sur le fait qu'être meilleur, littéralement, c'est juste gagner un peu plus par rapport à l'autre. On peut ensuite être plus fin en envisageant des paliers de différence de niveau.
Il y a des jeux, même avec une part de hasard, où je sais que certain joueur vont réussir à atteindre les 100% (bon allez, disons 99% où même 95%) de chance d'en battre un autre. Dans tous les cas, quelques soit le hasard défavorable qu'il rencontre, le jeu est tel que la différence de niveau lui permet de compenser quoi qu'il arrive.

Je sais que je vais radoter par rapport à mes premiers messages, mais pour moi chaque jeu à une 'courbe de répartition de l'impact du hasard', en probabilité et en amplitude.
Par exemple, pour un jeu donné si on prend une partie à deux joueurs avec des points de victoire:
 - 50% de chance que le hasard n'avantage pas vraiment un joueur par rapport à l'autre
 - 30% de chance que le hasard donne un léger avantage de 1 à 10 points
 - 15% de chance que le hasard soit conséquent et donne un avantage de 11 à 20 points à un joueur
 - 5% de chance d'avoir une tirage ultra favorable qui donnera plus de 20 points d'avance à un joueur

Cette courbe n'est pas forcément la même selon le niveau des joueurs (parfois la courbe est très marqué pour les débutants et s'écrase avec l'expérience, et parfois au contraire avec l'expérience le moindre avantage hasardeux peut faire effet boule de neige et donc la pente de la courbe s'accentue avec le niveau des joueurs).

XavO dit : A force de vous lire, je suis complétement d'accord sur le fait que l'incertitude liée au hasard du jeu et l'incertitude lié au comportement de l'adversaire ne sont pas de même nature. Du coup, je suis complétement d'accord sur l'idée que l'amalgame que j'ai fait dans mon premier message est abusif.

Ahah c'est bien, parce que moi aussi, à force de relire mes réponses, et donc de me remettre en question, j'y ai réfléchis, et bien que je reste persuadé que en théorie les deux sont bien distincts, je finis par penser que la réalité peut être plus nuancé.
Ce qui me faisait faire la distinction, c'est le côté 'possibilité d'anticiper' sur les actions humaines. Mais parfois, sur un jeu chaotique OU un jeu qu'on ne maîtrise pas (parce que débutant ou jeu trèèèèèès compliqué), sans avoir de repère pour cerner le jeu adverse, l'action d'un joueur autour de la table peut subjectivement apparaître comme du hasard, au sens où on avait pas d'éclairage pour déterminer à l'avance son comportement.
Je pense que c'est surtout valable sur un jeu à 3 joueurs ou plus.

Mais en poussant les limites de mon cerveau au maximum (rassurez vous ça a été vite ! ), j'ai repensé au jeu Insert, qui est un jeu abstrait avec AUCUN hasard. Mais sans réexpliquer le jeu, il faut savoir que lorsqu'on joue un coup, on contraint très fortement les possibilités pour le coup suivant, et on peut donc avoir des chaînes de coups quasi forcées assez longue.
De plus, un peu comme le jeu où il faut retirer des allumettes, l'écart entre victoire et défaite tient très souvent à la parité des coups à la fin, donc les situations qui ont l'air gagnante peuvent se révéler en fait perdante à la fin sans qu'il n'y ait eu d'erreur du joueur.

En théorie, tout est calculable depuis le premier coup (je rappelle, zéro hasard). En pratique, c'est évidemment impossible, et bien qu'avec l'expérience l'anticipation, la lecture et le calcul s'acquièrent, il arrive souvent de jouer un coup car il a l'air de mener à une situation correct 4 ou 5 coups plus loin. Pourtant, en poursuivant, on se rend compte ensuite que c'était un coup irrémédiablement perdant lorsqu'on poursuit encore 3 ou 4 coup de plus.
Dans ce cas, la situation 'sort' du périmètre de ce que le joueur peut calculer, donc est ce qu'on considère que c'est le hasard si son coup a priori gagnant est se révèle en fait complètement perdant ? Par vraiment de façon absolue, mais en reprenant comme tu disais le point de vue du joueur, ça y ressemble quand même fortement... 

Bref, tout ça ne nous avance pas vraiment, mais c'est juste pour dire que malgré des belles théories, il y a tellement de jeu différents aujourd'hui qu'on trouve toujours un casse pied pour ne pas rentrer dans les belles cases de ces belles théories (mais ça reste beau quand même ! ).

 

XavO dit :Je reste sceptique sur le fait que du point de vue de l'activité du joueur, cela ne se résume pas à gérer de l'incertitude. Duflo explique que l'activité de jeu est une économie du risque : le joueur passe son temps - non pas à optimiser ses coups - mais à optimiser son plaisir. Celui-ci étant sur le plan ludique (le jeu a d'autres dimensions offrant du plaisir : narrative, sociale...) proportionnel à un rapport entre risque et compétence. L'idée est que si l'on arrive à surmonter un défi important par rapport à notre compétence, on se fera plus plaisir que si le défi est trivial pour nous. L'auteur explique ainsi que l'on peut volontairement se mettre en danger pour majorer son plaisir (par exemple face à un adversaire plus faible). Le risque et l'incertitude sont deux concepts très liés : gérer son risque, c'est gérer son incertitude, la baliser, la réduire, la maitriser.

Oui c'est vrai que l'incertitude du résultat contribue à être 'heureux' d'avoir bien joué. Ecrasé / se faire écraser par des adversaires au niveau trop éloigné est parfois moins appréciable ludiquement.
Après je sais que personnellement, j'aime aussi (notamment sur les parties en lignes) comprendre pourquoi je gagne, je perds, revoir mes parties ou celles de bons joueurs pour analyser les différentes possibilités...

Difficile de parler pour l'ensemble des joueurs et d'essayer de "théoriser" des choses tellement il doit exister de comportement !

Et si on prend l exemple d un jeu de baston mastermind?

Trône de fer l adversaire peut attaquer par la mer ou la terre… Il n’y a pas forcement un coup meilleur que l autre 
Ou quand un troisieme joueur peut soutenir celui qui mène (pour mettre hors jeu un joueur) ou celui qui perd (pour rééquilibrer)…