Bonjour !
De retour de Cannes, je viens de tomber sur ce post qui me semble me concerner, donc réponses. Il y a trop de boulot pour répondre à tout le monde mais je vais le faire principalement à Mérome, puisqu’il est l’initiateur du post. Par contre pour le choix de la réponse, je ne trouve rien qui ne me corresponde vraiment
Merome dit:
Déjà, graphiquement, j’ai du mal à accrocher. Les fonds de plateaux sont fouillis, on y lit assez mal les informations au premier coup d’oeil. Les polices de caractères ne sont pas homogènes et certaines sont proprement illisibles, comme cette espèce d’italique fin que l’éditeur nous colle dans la plupart de ses jeux (Titre sur la boite de Ys, par exemple).
Evidemment, ici ce serait des goûts et des couleurs. Personnellement, si je trouve Menzel est un grand artiste (j’adore ce qu’il a fait sur Golden Kompass), il ne me viendrait pas à l’idée de l’embaucher car finalement, je trouve que tous les “gros jeux” vont finir par se ressembler et manquer de parti pris.
A titre personnel, j’ai toujours fait des choix graphiques en fonction du jeu (Yspahan et son look Tex Avery, Caylus que l’on a voulu représenter comme une tapisserie médiévale très simple,…) et je sais parfaitement que ce genre de choix ne plaira jamais à tout le monde. Tant pis, je ne vais pas commencer à faire des choses pour plaire à la majorité (ce qui reste en plus à prouver).
L’iconographie suit une logique tout aussi douteuse ainsi que le matériel.
Là encore, c’est une question de point de vue. Généralement je crois que notre iconographie est justement définie pour être claire. Je crois que si Caylus à connu un tel succès alors que c’est un poids lourd, c’est justement grâce à une iconographie sans (trop de) failles qui permet même au novice de s’y retrouver assez rapidement (généralement après le premier tour de jeu). Quand tu construit un bâtiment de Caylus ou que tu poses un paysan à Amyitis, tu sais ce que tu gagnes…
Pourquoi diable le prévot (ou le bailli, je sais plus) de Caylus est représenté par un cachet d’aspirine ? Pourquoi un chameau, un talent et une ressource ont-ils la même forme, même taille dans Amyitis ?
Tout cela n’a que peu de rapport avec l’iconographie, mais je vais te répondre tout de même. Il est évident que ce serait mieux de pouvoir mettre des personnages prépeints, des ressources en résine, etc, mais tout cela à un coût.
La réalité économique des jeux de société est malheureusement méconnue, mais sachez tout de même qu’offrir Caylus à un prix conseillé de 36€ (et moins en Allemagne) représente un petit exploit. Le plus petit changement de confort à des répercussions assez fortes sur le porte monnaie des joueurs et j’estime donc qu’il faut savoir raison garder.
Est ce que Caylus serait un meilleur jeu avec des pions prépeints ? La réponse est négative, même si j’admet que le confort de jeu serait renforcé. J’aime également me faire plaisir, et c’est pour cela que nous avons sorti la version deluxe, mais de telles initiatives ne doivent pas se substituer à la réalité économique…
Mon but est donc de proposer aux joueurs de bons jeux (ce qui reste subjectif) avec un matériel qui ne soit pas bon marché (nos jeux sont produits au mêmes endroits que ceux des plus grosses compagnies). Tout le monde n’a pas forcément les moyens de mettre 45€ pour un jeu et je préfère donc mordre un peu sur le luxe et proposer mes jeux à 10€ de moins, sans rien sacrifier en terme de qualité du matos (épaisseur des tuiles, cartes, qualité du bois,…)
A titre personnel j’ai fait mes classes sur des jeux comme Dune ou Civilisation, dont le matériel et les graphismes passeraient de nos jours pour “non professionels”. Autre temps, autres moeurs bien sûr, mais ces éléments défaillants ne nous empêchaient pas de nous prendre au jeu et de nous passionner. A l’inverse, de nos jours j’ai l’impression que certains jeux (pas la majorité bien entendu) se cachent un peu sous le luxe de leur matériel pour dissimuler certains manques. A bien y réfléchir, j’aimais mieux l’ancienne méthode…
Plus grave à mon sens, l’adéquation entre le thème et les mécanismes est étrange. Par exemple à Amyitis, l’action de planter UNE plante, se traduit physiquement par récupérer une tuile (qui découvre une vague pelouse).
Les processions dans les temples qui donnent lieu à un calcul de majorité, qui donne des avantages abscons : d’où ça sort ?
Comment expliquer, par rapport au thème, qu’une ligne majoritaire de paysans permet de gagner un jardinier ?
Tout cela ne me saute pas aux yeux et nuit, à mon sens toujours, inutilement à la compréhension du jeu.
J’ai lu des réponses intéressantes dans les topics suivants, donc je ne vais pas m’étendre trop. Cependant, je te ferais remarquer plusieurs choses.
1) Amyitis a été développé entièrement autour de son thème. Ainsi, la plupart des mécanismes ont vu le jour au fruit de mes lectures sur la civilisation babylonienne (en partant d’Alix, jusqu’aux ouvrages achetés à la bibliothèque du Louvres, ainsi que le net). Ainsi, j’ai ppu définir le titre (

En fait puisqu’on en parle, je veux bien lire une autre proposition de thème pour Amyitis qui prenne en compte toutes le spécificités du jeu. Je ne doute pas qu’il existe des possibilités, mais elles ne doivent pas être légion, ce qui est pourtant la marque du thème “plaqué”…
2) Le fait de se documenter n’implique pas pour autant le devoir de faire un jeu simulationiste, en tout cas ce n’est pas ma volonté de produire de tels jeux. A un moment donné, il faut donc savoir épurer un peu ses mécanismes en pensant au jeu. C’est ce que je fait.
3) Certains choix sont parfois dictés par l’intérêt du jeu plus que par le thème. Ainsi l’action de plater aurait pu être simulées en recoouvrant au fur et à mesure les jardins avec des tuiles de pelouse. Cependant, faire l’inverse permettait de mettre en place facilement un plateau modulaire ainsi que de compter facilement les plantes posées par chacun. Au final on voit tout de même les jardins se construire, mais les parties gagnent en diversité…
4) Comme toi, j’adore PR et LADR, mais je peux bien en pointer les “illogismes thématiques” de la même manière que tu l’a fait pour Amyitis. Bien entendu, je n’ai rien contre ces excellents jeux et cette affirmation peut facilement être étendue à n’improte quel jeu. Mais franchement, c’est faire un mauvais procès à un jeu que de lui reprocher ce genre de chose. Un jeu n’est pas plus une simulation de la réalité qu’une peinture est une photographie. Peut être que nos jeux ne te conviennent pas, et c’est ton droit le plus strict que de l’exprimer, mais pour moi cela s’arrête là…
Au final, j’ai l’impression que ce sont les mécanismes qui sont mis en avant, qu’ils sont équilibrés au quart de poil et que c’est ce qui fait que ces jeux ont un intérêt, mais au prix d’une mauvaise accessibilité, et pour ma part, d’un plaisir de jeu diminué.
On s’approche du jeu purement abstrait, et je trouve ça dommage.
Je ne vais pas aller trop loin dans les considérations philosophique, mais tout jeu est forcément une abstraction de son thème. Même la guerre de l’anneau avec ses 400 figurines ne te force pas à te battre réellement, et tu ne développes pas des vrais Warsuns dans TI3 (heureusement en fait

Notre optique est de proposer des jeux à un public de joueurs “confirmés” (enfin, je ne sais pas bien comment le définir, et à vrai dire au vu de mon séjour à Cannes personne n’a vraiment la solution sémantique à ce problème). Je suis conscient que l’accessibilité n’est donc pas notre point fort, mais on ne peut pas tout avoir et au final, c’est peut être mieux. Comme je l’ai déjà expliqué, ce que je crains le plus ce sont les “erreurs de casting” à savoir un personne qui achète nos jeux pour de mauvaises raisons et qui sera forcément déçue en jouant). Au moins cette difficulté est une “protection” pour l’acheteur

Enfin, j’aimerai terminer par quelques considérations sur TT et le fait qu’il soit “vendu” à Ystari comme je l’ai entendu dire cette semaine.
1) Je n’ai jamais passé la moindre publicité sur TT et à part quelques boîtes de jeux données (comme nous le faisons généralement avec toute la presse) et une invitation pour la remise du SdJ à Berlin, monsieur Phal n’a donc jamais reçu le moindre centime d’Ystari. Il n’a d’ailleurs jamais tenté de nous solliciter non plus. Enfin, monétairement s’entends, car on cause souvent “prostate” ces derniers temps
2) Je fréquentais TT bien avant d’être éditeur et le fréquenterai probablement encore quand je changerai de métier. J’y interviens depuis
des années pour y dire exactement ce que je pense sur Ystari et sur le reste sans langue de bois. Comme tout le monde ici, je me suis engueulé et au fil du temps j’ai également lié des amitiés, mais j’ose croire que personne ne me ménage ou ne m’encense ici pour ma propre gloriole. Par contre, je pense qu’effectivement nos jeux correspondent bien à la communauté ludique qui sévit ici et qu’à partir de là il n’est pas étonnant de récolter de bonnes notes auprès de ce qui est finalement notre coeur de cible.
3) Je n’aime pas vraiment pointer ce genre de chose, mais nos jeux se vendent bien à l’international. 60000 Caylus, 25000 Yspahan, 10000 Mykerinos ce sont de bons chiffres qui outrepassent largement la communauté TT. Il m’arrive évidemment d’intervenir sur BGG, mais pas au rythme où je le fait ici. Je n’ai donc aucun impact personnel sur les notes, avis et ventes à l’étranger (et je pense que c’est pareil en France). Bref je n’ai pas de recette pour vendre des jeux Ystari et aucune idée des raisons qui poussent les gens à les acheter, mais je suis ravi de voir que d’autres personnes ont un avis sur la question
