Tout va bien

Il est donc exagéré d'affirmer que le quart de la population mondiale sera prochainement noyée.

:roll: Je n'ai pas vu ça dans le rapport, mais quand on veut tuer son chien, hein, on ne s'encombre pas de subtilités.

Entre être noyé et ne plus pouvoir bouffer parce que la montée des eaux a augmenté la salinité des terres et des réserves d'eau douce côtière, il y a une différence. Et vu que la moitié de la population mondiale vit à moins de 200 km des côtes - soit sur 1% du territoire mondial - dire qu'un quart pourrait être affecté relève d'une hypothèse plus réaliste que fantaisiste.
El comandante dit:...gauchiste...

Pas assez mon frère :
Selon Lutte Ouvrière , soucieuse du méfait de la concurrence,:mrgreen:

La décroissance, un point de vue parfaitement réactionnaire
Si les années quatre-vingt-dix ont vu émerger et se développer les idées de l’altermondialisme, ce courant est aujourd’hui concurrencé, chez un certain nombre de jeunes et moins jeunes plus ou moins contestataires, par un courant qui s’est baptisé : la décroissance. Refus de la croissance économique, « antiproductivisme », lutte contre la consommation, volonté de revenir à une économie locale, rejet du progrès technique, démarche de « sobriété » ou de « simplicité volontaire », sont les piliers de ce nouvel évangile.
Il est difficile de savoir si le relatif succès de ce courant sera un phénomène durable. Mais il est incontestable qu’il est, pour l’instant, à la mode. Certes, cela ne s’est pas vu lors des récentes élections européennes, où les listes Europe Décroissance n’ont recueilli que des scores insignifiants – entre 0,02 et 0,04 % suivant les circonscriptions. Mais la percée électorale des listes Europe-écologie reflète, en partie du moins, cette tendance, car nombre de partisans de la décroissance ont apporté leurs voix, au nom d’une sorte de « vote écologique utile », aux listes menées par Daniel Cohn-Bendit.
L’intérêt pour la décroissance d’une partie de la petite bourgeoisie intellectuelle, d’une frange de la jeunesse étudiante, paraît indéniable. En témoigne entre autres le relatif succès du journal La Décroissance, qui tire à quelque 50 000 exemplaires – ce qui est conséquent pour un journal politique.
Il est clair que le glissement vers la décroissance d’une partie des partisans de l’altermondialisme serait un recul, du point de vue des idées.
L’altermondialisme en effet, malgré ses limites et son caractère profondément réformiste, se situe au moins sur le terrain de la dénonciation des inégalités, et prétend vouloir mieux répartir les richesses entre les différentes régions de la planète.
La décroissance, elle, ou plutôt la nébuleuse d’organisations, de journaux et d’individus qui se réclament d’elle, se situe sur un tout autre terrain : celui des idées franchement réactionnaires. Ses partisans ne le nient d’ailleurs pas vraiment : Serge Latouche, le principal porte-parole de la décroissance en France, dénonce par exemple, dans l’introduction de son Petit traité de la décroissance sereine, « le totalitarisme développementiste et progressiste ». Le « totalitarisme progressiste » ! Il faut se pincer pour y croire. Il est peu probable que les femmes africaines qui font des dizaines de kilomètres à pied pour trouver un peu d’eau potable, ou les centaines de milliers de gens dans le tiers-monde qui meurent du sida faute de trithérapies, se réjouissent de ne pas être victimes du « totalitarisme progressiste ». On retrouve le même type de propagande anti-progrès dans un numéro de la revue décroissante Silences, qui a publié en Une un dessin montrant trois personnages monstrueux, mi-humains mi-reptiles, sous la légende : « Ils veulent détruire le monde ». Ces trois personnages étaient ainsi présentés : « La trilogie maléfique : croissance, consommation, progrès. »
Le décor est planté. Le courant décroissant affiche clairement non seulement son refus du progrès, mais sa volonté de revenir en arrière : un certain nombre de partisans de la décroissance ont pris par exemple le nom de « rétrogradeurs ».
Il n’y a rien de surprenant à ce qu’un courant de ce type apparaisse, ou plutôt réapparaisse, dans une période de crise comme celle que nous vivons. Les idées de « lutte contre la croissance », ainsi que leur pendant en matière de démographie, le malthusianisme, refont régulièrement surface pour tenter de répondre aux angoisses nées des crises. Cela n’a rien de réjouissant pour autant. Et nous pensons que les communistes révolutionnaires, même s’ils ne sont nullement des partisans de la croissance à tout prix, ni des « productivistes » acharnés, doivent militer résolument contre de tels courants. Tout simplement parce que nous nous plaçons, nous, sur le terrain du progrès humain et scientifique plutôt que sur celui d’un retour en arrière général de la société.
Le recyclage de vieilles idées
Les idées de décroissance sont apparues il y a une trentaine d’années. Des auteurs des années soixante et soixante-dix, économistes, sociologues ou… théologiens, en ont posé les bases : Nicholas Georgescu-Roegen (1906-1994), le « révérend père » Ivan Illitch (1926-2002), ou le malthusien Paul Ehrlich (né en 1932).
Ce courant s’est développé en même temps que la crise du capitalisme, au début des années soixante-dix, s’approfondissait. C’est à cette même époque que des groupes de réflexion, dont le plus célèbre s’appelait le Club de Rome, ont remis au goût du jour les théories de Malthus (1766-1834), qui professait que l’accroissement de la population conduisait forcément l’humanité à sa perte. Rien de nouveau sous le soleil : il y a plus d’un siècle, le socialiste Bebel écrivait déjà que les idées malthusiennes se développaient toujours « dans les périodes de décadence de l’ordre social, [où] le mécontentement général est toujours attribué à l’abondance d’hommes et au manque de vivres et non pas à la manière dont on les obtient et les divise ».
Ce sont également les années soixante-dix qui ont vu émerger, dans la mouvance hippie, les idées plus ou moins farfelues de retour à la nature, d’une plus grande communion avec celle-ci, d’un rejet de la technique et du « productivisme », de constitution de petites communautés indépendantes – toutes idées que l’on retrouve aujourd’hui dans la décroissance.
Un courant aux idées confuses
Parmi les penseurs de la décroissance, on trouve de tout. Car la décroissance n’est pas une théorie scientifique, mais un conglomérat d’idées parfois totalement contradictoires.
Cette hétérogénéité permet à ce courant de dire tout et n’importe quoi, et explique que certains de ses partisans se réclament de l’extrême gauche et d’autres, comme Alain de Benoist, clairement de l’extrême droite. Citons, à titre d’exemple et sans chercher à généraliser ce type de propos à tout le courant décroissant, le théologien Jacques Ellul, considéré comme un des pères de la décroissance, qui écrivait en 1986 : « Nous constatons que dans la Bible, l’intervention divine a lieu quand l’inhumanité, quand le mal moral et physique dépasse les bornes. Dieu provoque un événement approprié à cet excès d’inhumanité, qui placera l’homme devant le choix de se repentir ou de mourir. Je suis convaincu que l’apparition du virus du sida correspond à cet ordre d’action de Dieu. »
La décroissance se résume à un mélange confus d’écologie, d’anarchisme, d’anticapitalisme et de malthusianisme. Partant de l’affirmation que les ressources naturelles sont limitées et que la production s’accroît sans tenir compte de ces limites, la décroissance prône la lutte contre la croissance économique, contre la consommation de masse et le développement de la technique. Elle préconise le retour à l’artisanat contre l’industrie, la production locale et la vie à la campagne – s’inspirant en la matière de l’anarchisme proudhonien. Certains intégristes de la décroissance vont jusqu’à prôner le refus du développement pour les pays les plus pauvres, et même… de la médecine, pour certains d’entre eux. Exagération ? Pas du tout : l’un des principaux théoriciens de la décroissance, Ivan Illich, dénonçait la médecine moderne sous prétexte qu’elle détourne de l’autodiagnostic et de l’automédication. Notons au passage que le même Illich militait contre l’école – une « drogue » censée préparer les futurs adultes à consommer et à en faire des esclaves. Illich a par exemple publié, en 1971, un article sur « le potentiel révolutionnaire de la déscolarisation ». Même si tous les décroissants ne partagent pas forcément ce point de vue, se réclamer aujourd’hui d’un tel auteur est choquant, à une époque où des dizaines de milliers de jeunes des quartiers pauvres, en France, sont « déscolarisés », sans que le « potentiel révolutionnaire » de cette catastrophe sociale saute aux yeux...
Tout naturellement ce type d’élucubrations conduit certains décroissants à lutter contre l’idée qu’il faudrait construire des hôpitaux et des écoles dans le tiers-monde. Pour eux, les pays pauvres sont des îlots préservés du vice de la consommation – forcément – et y implanter écoles et hôpitaux reviendrait à les pervertir. D’ailleurs, si l’on suit cette logique, les pays pauvres sont forcément, du point de vue des décroissants, des endroits merveilleux, justement parce qu’ils sont pauvres et préservés des dérives consuméristes. La décroissance, sous le vocabulaire pudique d’un retour à la « simplicité volontaire », prône le retour à la pauvreté. Serge Latouche cite par exemple dans un de ses ouvrages un livre dont il estime qu’il est « le précurseur des idées de la décroissance ». Ce livre s’appelle : « La pauvreté, richesse des peuples ».
Bien entendu, tous les décroissants ne profèrent pas de semblables insanités. Si une partie de ce courant considère le sous-développement comme un bienfait, d’autres disent vouloir combattre celui-ci, mais en préconisant que les habitants des pays dits riches… se serrent la ceinture. L’idée étant que, le gâteau n’étant pas assez gros pour tout le monde, il faut que les pays occidentaux mangent moins pour que les pays pauvres mangent plus. Il s’agit ici de culpabiliser les prétendus « riches » que seraient les habitants des pays développés. Cette façon de raisonner, finalement pas très éloignée d’une conception chrétienne de la charité, n’est évidemment pas non plus la nôtre. Comme l’écrivait Bertolt Brecht dans sa Chanson de Salomon : « Saint Martin a donné la moitié de son manteau à un pauvre. Comme ça ils sont morts de froid tous les deux ». Serions-nous d’odieux « productivistes », parce que nous préférons lutter pour un système qui permettrait de produire autant de manteaux qu’il y a de gens qui ont froid ?
Quelle que soit la tendance à laquelle ils appartiennent, cette thématique du retour à la pauvreté est constamment présente dans la propagande des décroissants. Jusqu’à la nausée : la Une du journal La Décroissance, en septembre 2004, osait clamer sur cinq colonnes : « Vive la pauvreté ! ». Il n’est pas sûr que les six millions de personnes en France qui vivent des minima sociaux, que les 3 000 chômeurs supplémentaires par jour, qui vont s’inscrire en ce moment au Pôle emploi, apprécient. De même qu’il n’est pas évident que les millions de travailleurs qui ne parviennent pas à boucler leurs fins de mois adorent la Une récente du même journal : « Merde au pouvoir d’achat ! »
Mais c’est que tous ces pauvres ne veulent pas comprendre, selon les décroissants, que toutes les choses confortables et pratiques qu’ils veulent avoir, telles qu’une machine à laver, une voiture, un ordinateur, une connexion Internet, etc., ne sont que des gadgets stupides qui éloignent de la simplicité, de la spiritualité et du retour sur soi. D’ailleurs, il faut croire que les plus pauvres des travailleurs sont les meilleurs pratiquants de la décroissance, puisqu’ils expérimentent régulièrement – bien contre leur gré il est vrai – des « actions » prônées par les décroissants telles que les « journées sans achat » ou les « Noël sans cadeaux ».
Il y a beaucoup d’indécence à prôner ainsi la misère dans une société où tant de gens n’ont rien. Mais cela ne dérange visiblement pas trop les décroissants, qui affichent, pour beaucoup d’entre eux, un mépris assez sidérant pour les plus pauvres, les moins cultivés, ceux qui n’auraient pas, comme eux, assez d’intelligence ou de culture pour comprendre que le confort ne sert à rien ; ou que pour économiser l’eau des chasses d’eau, aller aux toilettes dans une litière sèche, comme les chats, est le comble du bonheur.
Une doctrine individualiste…
La décroissance apparaît comme une doctrine individuelle et individualiste, dans ses constats comme dans ses modes d’action. Pour une bonne partie de ses promoteurs, il faut « se changer soi-même pour changer le monde » – ce qui revient à nier toute possibilité d’un changement de société par des moyens de lutte collective.
Les modes d’action prônés oscillent, pour la plupart, entre le ridicule et le choquant. Ainsi le « manuel du bon rétrogradeur » publié dans La Décroissance préconise-t-il de « se libérer de la télévision, de l’avion et du téléphone portable ». De l’automobile également, bien sûr, qu’il conviendra de remplacer par « des charrettes à cheval ». Au passage, pour ceux qui se demanderaient ce qu’il adviendra des travailleurs qui produisent lesdites automobiles, un rédacteur du journal La Décroissance a écrit un article en 2004 intitulé : « Fermons les usines Citroën ! ». Il faut également arrêter d’utiliser les ascenseurs, les réfrigérateurs, les machines à laver, ne plus manger de viande, etc. Le rêve des décroissants, c’est la vie à la campagne, près de la terre, en autarcie, sans technologie, en harmonie avec la nature et avec soi-même – la pauvreté ou la « simplicité » permettant de mieux ressentir cette harmonie.
Si un certain nombre de décroissants prétendent n’avoir pas renoncé à l’action collective, ils n’en citent pas moins comme modèles des comportements qui rejettent celle-ci. Paul Ariès, par exemple, dit dans une interview qu’il est « un militant politique qui veut changer le monde ». Dont acte. Mais cela ne l’empêche pas, dans le journal qu’il dirige, de consacrer une pleine page à « Anne, psychologue », adepte de la simplicité volontaire, qui déclare : « On est plus heureux en possédant moins. Je ne crois plus à l’impact de notre action sur le plan planétaire. J’ai arrêté de croire que j’allais sauver le monde. On vit simplement, parce que ça nous fait du bien. »
Mais même ceux qui, parmi les décroissants, ne donnent pas dans cet affligeant individualisme, prônent l’action individuelle, la « réflexion individuelle sur les comportements de consommation » … ce qui revient, au fond, à rejeter la responsabilité des problèmes de la société sur les consommateurs, c’est-à-dire sur les plus pauvres, et surtout pas sur les capitalistes.
…ou totalement inefficace
Certains décroissants prônent, comme modèle d’action collective, le boycott des marques, le fait de refuser de faire ses courses dans les hypermarchés pour préférer le « lien direct avec le petit producteur », celui de cultiver soi-même ses légumes ou de fabriquer ses vêtements, bref, appellent à « changer leurs modes de consommation ». L’idée étant d’étouffer le grand capital en lui coupant l’oxygène que lui procure la vente de ses marchandises.
Un tel mode d’action serait inaccessible aux plus pauvres ? « Alibi égoïste ! », répondent les décroissants. C’est ainsi que dans un article de La Décroissance de juin 2009, l’auteur évoque certaines épidémies récentes, vache folle, grippe aviaire ou grippe porcine. Selon lui, la grippe porcine aurait pour origine l’élevage industriel des porcs (ce qui est discutable, mais c’est un autre débat). Voici son raisonnement : l’élevage industriel vise à produire de la viande peu chère, à destination des ménages qui ne peuvent, ou plutôt ne veulent selon lui, pas trop dépenser. Si ces ménages acceptaient de payer plus cher leur viande, il n’y aurait plus de marché, donc plus d’élevage en batterie, donc plus de maladies de ce type. CQFD. Nous n’inventons rien. L’auteur de l’article écrit : « En tant que citoyens des pays développés, il conviendrait de nous poser la question de notre responsabilité personnelle. Parce que, si à l’achat d’un produit le prix est l’un de mes critères importants, je suis personnellement responsable de ce genre de crise. En achetant le poulet à 6 euros le kilo ou un T-shirt à 5 euros, qui peut honnêtement croire que les méthodes de production puissent être écologiquement ou socialement acceptables ? »
Faudrait-il donc boycotter les produits bon marché ? De toute façon, un tel système serait impossible à généraliser dans une société où les capitalistes régentent toute la vie économique et sociale, où ce sont eux qui maîtrisent et la production, et les prix, et les salaires. Mais même érigé en doctrine, pour une société future, ce système est réactionnaire : le vieux Proudhon (même habillé de fibres bio), avec ses communes indépendantes et son retour à la production artisanale, n’est pas plus séduisant aujourd’hui qu’il ne l’était du temps de Marx. Prôner la fin de la grande production industrielle et de l’agriculture mécanisée, la « relocalisation de l’économie », c’est vouloir faire revenir le monde trois siècles en arrière. Pour nous, l’avenir est à la mondialisation communiste et pas, comme le prétend le décroissant Paul Ariès, à « une Europe dont chaque pays aurait ses propres moyens de vivre ».
Un nouvel avatar du malthusianisme
Le courant décroissant est en fait une nouvelle version, repeinte en vert, du vieux malthusianisme, ce qui le rend réactionnaire – et dangereux – par définition. Malthus était un ecclésiastique anglais du 18e siècle, effrayé par l’explosion démographique des débuts de la révolution industrielle, qui écrivit un traité devenu célèbre dans lequel il expliquait que l’humanité ne pourrait survivre à l’accroissement de la population, puisque le nombre d’êtres humains progressait infiniment plus vite que la quantité de richesses produites. Conclusion, selon Malthus : il fallait limiter les naissances ou, pour être tout à fait précis, laisser mourir les pauvres. « Un homme qui est né dans un monde déjà possédé, écrivait Malthus, s’il ne peut obtenir de ses parents la subsistance qu’il peut justement leur demander, et si la société n’a pas besoin de son travail, n’a aucun droit de réclamer la plus petite portion de nourriture, et, en fait, il est de trop au banquet de la nature ; il n’a pas de couvert vacant pour lui. »
Les idées de Malthus – déjà violemment critiquées par Marx et Engels en leur temps comme une « infâme, une abjecte doctrine, un blasphème hideux contre la nature et l’humanité » – ont connu nombre de continuateurs depuis deux siècles. Et, nous l’avons dit, chaque période de crise produit presque automatiquement son lot de malthusiens expliquant doctement qu’il faut limiter le nombre des naissances – plutôt que de se demander pourquoi le système économique n’est pas capable de donner à chacun « une place au banquet de la nature ». Aujourd’hui, certains courants anarchistes et nombre d’écologistes sont plus ou moins ouvertement malthusiens. Le Vert Yves Cochet a par exemple récemment proposé, dans le but de limiter les naissances, de couper les allocations familiales aux familles ayant plus de trois enfants, au prétexte qu’un enfant européen aurait « un coût écologique comparable à 620 trajets Paris-New-York ». Sans commentaire.
Le raisonnement de Malthus est de dire qu’il y a trop de monde pour pas assez de ressources. Celui des décroissants, qu’il n’y a pas assez de ressources pour que tout le monde vive dans le confort. Les termes du raisonnement sont inversés, mais c’est le même. Certains théoriciens décroissants se revendiquent d’ailleurs ouvertement de Malthus, mettant en parallèle la décroissance économique et la décroissance démographique, jugées toutes les deux nécessaires. Ivan Illich écrit ainsi que « le surpeuplement rend plus de gens dépendants de ressources limitées. L’honnêteté oblige chacun de nous à reconnaître la nécessité d’une limitation de la procréation [et] de la consommation ». Quant au pape actuel de la décroissance, Serge Latouche, il a osé signer récemment un article au titre sans équivoque : « Il faut jeter le bébé plutôt que l’eau du bain ».
Nous avons donc un tableau à peu près complet de la décroissance : une théorie individualiste, prônant la pauvreté volontaire, la baisse de la productivité et de la croissance économique, la limitation des naissances et le retour à la terre.
Quand intellectuels et politiques se découvrent décroissants
Ce courant, dont on voit qu’il ne dépasse guère le degré zéro de la réflexion politique, est-il vraiment en train de se développer ? En tout cas, il séduit un certain nombre de jeunes dans les milieux intellectuels. Et le petit succès des écologistes aux élections européennes a visiblement donné envie à beaucoup de commentateurs de prendre en marche le train – ou la charette à cheval – de la décroissance.
Ainsi un éditorialiste politique de France Inter, le 8 juin au matin, expliquait-il : « Les Verts (…) estiment que l’écologie offre une occasion de changer la vie, les rapports entre les gens, le rapport à l’argent. (…) Et surtout, ils commencent à remettre en cause la notion même de croissance. On parle de « nouvelle frugalité », de « croissance sélective » ou de « décroissance sélective ».
Quelques jours après, le 13 juin, c’est cette fois dans une double page du quotidien Le Monde que trois éminents intellectuels s’exprimaient sur le sujet de « l’écologie politique ». Sur les trois articles, deux adoptaient le point de vue des décroissants, avec plus ou moins de nuances. Jean Gadrey, « membre du conseil scientifique d’Attac », dénonçait « le paradigme actuel de développement, fondé sur l’impératif de croissance ». Selon ce savant économiste, il va falloir apprendre à créer des emplois « sans gain de croissance ni de productivité ». Et c’est à un vaste retour en arrière qu’il appelle ses lecteurs, avec par exemple « le remplacement progressif de l’agriculture industrielle (…) par de l’agriculture biologique de proximité ». Naturellement, tout ce discours est émaillé de bonnes paroles sur les « créations d’emplois » que généreraient de telles mesures. Certes. De la même manière, le remplacement des automobiles par des chaises à porteurs, ou des cargos par des galères, générerait un bon nombre d’emplois. Mais serait-ce vraiment un progrès ?
Dans la même double page du Monde, le sociologue Edgar Morin soutient plus franchement encore les thèses décroissantes – et dans ce qu’elles ont de plus ridicule. Le but ultime de l’écologie politique, c’est selon lui de « poétiser la vie ». Tout un programme, qui passe par la lutte contre les « intoxications consuméristes » et la nécessité de « changer nos vies dans le sens de la sobriété ». Morin se réfère explicitement dans son article au théoricien de la décroissance, le « révérend père » Ivan Illich. Et il conclut avec ces propos assez niais : « Toutes les solutions envisagées sont quantitatives : croissance économique, croissance du PIB. Quand donc la politique prendra-t-elle en considération l’immense besoin d’amour de l’espèce humaine perdue dans le cosmos ? ». Remplacer la croissance par de l’amour, cela ne remplira pas le ventre des millions d’enfants qui meurent de faim dans le monde chaque année, mais cela permettra au moins, selon Morin, de « poétiser leur vie ». Ou leur mort, en l’occurrence.
Au-delà des écologistes eux-mêmes, la plupart des partis de gauche, PS, PCF, et même le NPA, flirtent avec les idées de « décroissance », « rupture avec la croissance » ou « antiproductivisme ».
Le PCF par exemple, dès 2005, déclarait lors d’un forum à la Fête de l’Humanité, par la bouche de Alain Hayot : « Il faudrait quatre à cinq planètes si toute la population mondiale produisait et consommait sur le même modèle que l’actuel monde dit développé. La croissance actuelle génère autant de dégâts sociaux qu’environnementaux ». La croissance, vraiment, pas la logique du profit ? Et Alain Hayot pousuit : « Il nous faut repenser le type même de développement et de croissance dans ses finalités comme dans ses modes opératoires,(nous) inscrire dans le dépassement des modes de production et de consommation actuels. »
Dans les « principes fondateurs » du NPA – texte dans lequel il n’y a pas une seule occurrence du mot « communisme » – on trouve le paragraphe suivant : « En opposition aux modes de production et de consommation actuels, nous proposons la relocalisation de l’économie, la redistribution des richesses, la décroissance de la consommation des ressources non renouvelables… » : « Relocaliser l’économie », qu’est-ce que cela veut dire ? Que les différentes régions de la planète devraient vivre en autarcie ? Voilà qui va compliquer quelque peu « la redistribution des richesses », vu que certaines régions de la planète sont totalement incapables, pour des raisons géographiques, climatiques et géologiques, de produire un certain nombre de richesses.
Mais certains membres du NPA vont bien plus loin. Philippe Corcuff, enseignant à Sciences Po Lyon, sociologue et « spécialiste de philosophie politique », membre de la direction du NPA après l’avoir été de celle de la LCR, a ainsi participé, le 2 mai dernier, à un colloque organisé par le journal La Décroissance sur le thème : « Non au capitalisme vert ». Dans son intervention, il souligne « les nouvelles convergences » entre « anticapitalisme et antiproductivisme ». Dans le charabia prétentieux qui est souvent la langue des sociologues, Corcuff se félicite que chacun (anticapitalistes et antiproductivistes) ait « amorcé une autoanalyse critique de ses propres impensés ». Et de poursuivre : « Depuis la fin du XIXe siècle, les différentes variantes de socialisme ont souvent été imbibées de productivisme, d’une croyance (…) qu’il suffisait de se débarrasser des chaînes de l’exploitation capitaliste pour résoudre tous les problèmes ». D’où viennent ces « croyances » ? De Marx, bien sûr. Corcuff dénonce les « ambivalences » d’un Marx qui, d’une part, « semblait marqué par une fascination productiviste pour le développement industriel qu’il avait sous les yeux », et de l’autre dénonçait la production capitaliste qui « épuise en même temps les deux sources d’où jaillit toute richesse : la terre et le travailleur » (Le Capital). Ce raisonnement de Corcuff sur les « ambivalences » de Marx ne prouve qu’une chose : c’est que l’on peut être docteur en sociologie sans être capable de comprendre le BA-ba du marxisme. Oui, Marx était « fasciné » par les extraordinaires forces productives que le capitalisme était capable de faire sortir de terre ; et oui, il était révolté par l’exploitation du prolétariat et par l’irresponsabilité avec laquelle les capitalistes traitaient la nature. Il en concluait donc qu’il fallait mettre les forces productives au service de la population en les arrachant aux capitalistes, par le moyen d’une révolution sociale. Il n’y a ici pas plus d’ambivalence qu’il n’y a de marxisme dans la tête de Philippe Corcuff.
Marxisme et décroissance
Il n’y a en fait que ceux qui ne connaissent ni Marx ni le marxisme qui pensent que celui-ci était un « productiviste » acharné, incapable de se poser la question de l’épuisement des ressources naturelles ou de la lente destruction de la planète par le système capitaliste. Bien au contraire : Marx et Engels ont sans doute été parmi les premiers à poser ces problèmes.
Parler de risque d’épuisement des ressources naturelles – et en particulier des sources d’énergie fossiles comme le pétrole – est aujourd’hui un lieu commun. Le propre des énergies fossiles étant d’être non renouvelables, elles arriveront nécessairement à épuisement un jour. Tout juste peut-on noter que les délais qui nous séparent de cette date sont probablement plus longs que les écologistes et les décroissants le prédisent : dans les années soixante-dix, les mêmes courants prévoyaient la fin définitive des ressources pétrolières en l’an 2000.
Mais cette question de l’épuisement des ressources est évidemment pertinente. Tout comme sont pertinentes bien des questions que posent les décroissants : oui, le capitalisme pousse ceux qui en ont les moyens à la consommation, par le biais de la publicité et de la création de modes artificielles. Oui, le capitalisme fabrique volontairement des produits qui deviennent obsolètes très rapidement pour pousser les acheteurs à les renouveler. Oui, le capitalisme transforme tout ce qu’il touche en marchandise, et pousse, par mille biais, les êtres humains solvables (et même de moins solvables, grâce au crédit) à acheter des objets parfois inutiles. Est-ce une découverte ? Certainement pas. La « marchandisation » tant critiquée par les écologistes, les altermondialistes et les décroissants, c’est finalement le fait que le capital ne considère jamais un objet pour son usage, mais en fonction de ce qu’il peut rapporter lorsqu’il sera vendu. Le capitalisme ne produit pas pour satisfaire les besoins mais pour vendre en vue de faire un profit. Il n’y avait pas besoin des décroissants pour savoir cela, puisque Karl Marx l’a longuement expliqué dans Le Capital, il y a plus d’un siècle.
On sait également grâce au même Karl Marx que le capitalisme ne peut fonctionner qu’en réutilisant une partie de la plus-value gagnée lors de la production pour réinvestir dans le but d’accroître sa production. Ce que l’on appelle la « croissance », c’est-à-dire le fait qu’en dehors des périodes de crise la production de richesses augmente d’une année sur l’autre, est en réalité ce que Marx a défini sous le terme de « reproduction élargie du capital ».
Dans l’économie capitaliste, des périodes de décroissance sont des périodes de crise – la stagnation et à plus forte raison le recul de la production, ne résultant pas d’une évolution consciemment maîtrisée, mais se traduisant par des catastrophes sociales.
Parler, comme le fait Jean Gadrey cité plus haut, de renoncer aux gains de productivité, tourne en fait le dos à tout ce qui a permis à l’humanité de progresser pendant des dizaines de milliers d’années. Qu’ont fait les premiers hommes qui ont taillé des silex, sinon inventer des moyens d’accroître la productivité du travail ? Toute l’histoire de l’économie humaine est celle d’une longue bataille pour augmenter la productivité par l’amélioration des techniques de production – ce qui a permis, excusez du peu, de donner les moyens à l’humanité de s’affranchir peu à peu des contraintes imposées par la nature. Voilà donc ce que la décroissance veut jeter par-dessus bord ?
Et en quoi la « croissance », c’est-à-dire le fait que les richesses produites par la société humaine s’accroissent, pose-t-elle un problème ? Ce constat devrait au contraire être plutôt réjouissant : plus la quantité de richesses produites augmente, plus se rapproche la possibilité pour l’humanité d’offrir « à chacun selon ses besoins ». Et plutôt que de chercher à réduire la quantité de richesses produites par un retour à l’artisanat de village, il serait peut-être nécessaire de se demander comme faire profiter l’ensemble de l’humanité de cette abondance de richesses.
À cela, les décroissants répondent que c’est de toute façon impossible et utopique, puisque la terre ne peut produire assez de richesses pour satisfaire tout le monde. La théorie récente de « l’empreinte écologique », souvent brandie par les décroissants, va dans ce sens : si tous les humains vivaient avec le standard de vie des classes moyennes américaines, « il faudrait quatre planètes pour pouvoir y faire face ».
Poser la question de cette manière revient, au fond, à dire aux habitants des pays sous-développés qu’ils doivent rester dans la misère. Car il évident que l’ensemble de la population des États-Unis, d’Europe et du Japon ne va pas revenir à la charrette à cheval et à la bougie – et tant mieux. Mais au-delà, c’est le raisonnement lui-même qui est absurde. Exactement comme les malthusiens qui prévoyaient « l’extinction de la race humaine » au-delà d’un milliard d’habitants sur la terre, les partisans de ces théories ne tiennent aucun compte des possibilités que le progrès scientifique et technique pourra offrir à l’humanité. Malthus pensait que l’humanité s’éteindrait au-delà d’un milliard d’individus parce qu’il ne pouvait pas imaginer ce que serait un jour l’agriculture intensive et la productivité de l’industrie actuelle. Au moins avait-il quelque excuse, en 1780. Les décroissants d’aujourd’hui, qui sont témoins de ce que la technologie est capable de réaliser et des espoirs qu’elle offre, n’en ont, eux, aucune. Essayer d’imaginer ce que seront les capacités productives de la société dans cinquante ans est impossible. Le raisonnement des malthusiens sur ce sujet est aussi absurde que le dialogue d’une plaisanterie célèbre : deux hommes de Cro-Magnon bavardent en revenant de la chasse aux mammouths. L’un dit : « Tu sais, je crois qu’il y aura six milliards d’être humains dans 40 000 ans. » – « Tu es fou, répond l’autre. Il n’y aura jamais assez de mammouths. Il faudrait au moins 6 000 planètes ! »
Alors, non, nous ne pensons pas que l’avenir de la société soit dans la réduction de la croissance à tout prix. Pas plus que nous ne pensons qu’il réside dans l’augmentation de la croissance à tout prix. Cette augmentation est, de fait, une des lois du capitalisme, système dans lequel le seul régulateur de la production est le marché aveugle. Personne, pas même les capitalistes eux-mêmes, n’a réellement de contrôle sur la production. Seule une société libérée de la concurrence, où la production serait démocratiquement planifiée en fonction des besoins, pourrait être une société où la croissance est maîtrisée – ce qui supposerait une croissance de la production de certaines marchandises si la hausse des besoins existe, et une décroissance de la production dans d’autres secteurs le cas échéant. Mais tout cela serait décidé et contrôlé par la population elle-même. Une telle société, cela s’appelle une société socialiste ; et elle ne pourra voir le jour qu’à la suite d’une profonde révolution mondiale, qui mettra fin à la dictature des capitalistes sur la société.
Ce n’est pas, on l’a compris, le but des décroissants. Bien dans l’air du temps où les idées de lutte collective n’ont pas le vent en poupe, les décroissants prônent l’action individuelle, le chacun pour soi. La plupart d’entre eux ne préconisent nulle lutte collective, mais conseillent à chacun de se retirer du monde moderne pour sauver sa propre peau… certainement sans ignorer qu’il y aura toujours des ouvriers, malgré tout, pour fabriquer les ordinateurs et le papier qui leur permettent d’écrire des âneries dans leurs journaux.
Avec les décroissants, les capitalistes n’ont pas de souci à se faire. Bien au contraire : si, ce qui est fort peu probable, les idées décroissantes dépassaient le cercle fermé de la petite bourgeoisie écologiste, ce serait une bénédiction pour les capitalistes : ils auraient face à eux des travailleurs qui non seulement accepteraient leur sort, mais seraient tout joyeux de voir leur pouvoir d’achat se dégrader, au nom du retour à la simplicité. Des habitants des bidonvilles qui ne feraient plus d’émeutes de la faim, mais qui remercieraient leurs exploiteurs de n’avoir ni écoles, ni hôpitaux, ni médicaments, ni confort. Nous sommes bien convaincus que cela n’arrivera jamais – car il faut avoir le ventre plein pour prôner de telles idées. Mais quand, comme l’a fait un Gandhi par exemple (une autre idole des décroissants), on prône la résignation aux pauvres en leur disant que leur misère est une richesse, et qu’on arrive à les convaincre, les peuples n’ont à y gagner qu’un accroissement de cette misère.
Les décroissants veulent faire croire qu’il n’y a pas d’autre alternative pour l’humanité que de se noyer dans la graisse de la surproduction capitaliste d’un côté ou de rejeter tout progrès en acceptant, voire en se réjouissant, de sa misère. C’est au mieux une stupidité, au pire, un mensonge. Il existe une autre alternative – seule capable non seulement de résoudre les problèmes de pauvreté mais aussi ceux de la destruction de l’environnement par un capitalisme irresponsable et criminel : une révolution sociale, et l’instauration d’une société dirigée et contrôlée par la population elle-même : le communisme.


Enfer vert ou Paradis rouge? :lol:


C'est beau comme Arlette :pouicboulet:

Malheureusement je suis pas très optimiste pour toutes ces questions d’intérêt généraux, beaucoup trop de monde pense d’abord profits, carrière et intérêts personnels, et en premier ceux qui nous dirigent d’ailleurs.

Hier et avant-hier y avait sur la 2 une rétrospective de la carrière de Chirac (c’est qu’un exemple parmi tant d’autres), j’ai rien découvert mais bon… c’est assez blasant d’écouter des mecs commenter après-coup ‘ici on a pris telle décision car c’était mieux pour nous, etc…’ et choquant de voir qu’au final ça ne choque pas grand monde justement.

bertrand dit:...


Pour résumer, décroissant=bobo=écolo=rétrograde=nanti égoïste=consommateur bio=AMAP=catho bien pensant=donneur de leçons=esclave consentant=facho (j'en oublie forcément, j'ai lu la fin en diagonale).

Tu as raison, ce texte est extrêmement bien fichu, il reflète merveilleusement ta conception de la division du monde en grandes cases, qui permet de reprocher à X ce que pense Y et réciproquement pour mieux jeter à la poubelle tous ces braves gens et leurs idées, sans avoir pris la peine d'en réfuter une seule.

PS : mets-moi dans la case que tu voudras.
grolapinos dit:
PS : mets-moi dans la case que tu voudras.

Sous le lapin sommeille le pétain. - El Co




:kingboulet:
grolapinos dit:
bertrand dit:...

Pour résumer, décroissant=bobo=écolo=rétrograde=nanti égoïste=consommateur bio=AMAP=catho bien pensant=donneur de leçons=esclave consentant=facho (j'en oublie forcément, j'ai lu la fin en diagonale).
Tu as raison, ce texte est extrêmement bien fichu, il reflète merveilleusement ta conception de la division du monde en grandes cases, qui permet de reprocher à X ce que pense Y et réciproquement pour mieux jeter à la poubelle tous ces braves gens et leurs idées, sans avoir pris la peine d'en réfuter une seule.
PS : mets-moi dans la case que tu voudras.


Pas mieux.

Le pamphlet de LO (qui a tant de leçons à donner en matière de réalisme ou de démocratie...) est bien connu dans les cercles écolos. Heureusement il n'empêche personne d'avancer vers leur but ultime : plonger le monde entier dans la misère noire. :roll:

Là, normalement, le prochain texte que sort Bertrand doit venir du satellite du FN qui prône lui aussi la décroissance. Fais le vite, qu'on finisse de faire le tour et que l'on puisse passer à autre chose entre fachos de bonne société.
Smart dit:... Qui a dit plein de choses intéressantes et qui est comme moi : un amoureux du terroir et de la ruralité.

tient pour te répondre et car je trouve ton analyse intéressante : l'ayant moi même entrevue un petit peu (les broutards du limousin qui émigrent en Italie par exemple)

lu sur le blog de paul jorion

Vétérinaire de mon état, néo-urbain depuis 2 ans, j’ai exercé pendant 15 ans en milieu rural. Durant cette période, j’ai été confronté de très près à la trop fameuse crise dite de la vache folle. Pour tout dire, j’ai été le bras armé d’une législation incohérente qui me conduisit à euthanasier – par injection létale – un troupeau de 70 vaches même pas folles. C’est, entre autre, cette pathétique corrida qui m’a amené à être exhaustif sur le sujet. Par contre, mes connaissances en économie sont beaucoup plus lacunaires. Je ne sais donc si c’est une ânerie ou une lapalissade, mais il me semble que la crise actuelle ressemble davantage à une crise sanitaire type vache folle qu’à une crise économique classique. Nous verrons que si cette intuition de profane est correcte, cela expliquerait pourquoi nous serions loin d’être sortis du pétrin.
Ce qu’on peut dire d’emblée, c’est qu’avec la vache folle la (dé)raison économique l’a emporté sur la raison sanitaire. Le même processus morbide est à l’œuvre dans la crise actuelle, sauf qu’il s’exprime à un niveau supérieur : c’est la (dé)raison financière qui s’essuie les pieds sur la raison économique.
La Vache Folle, une histoire de la déraison économique
Au risque de surprendre, je dirais que la crise de la VF trouve son origine dans les accords de Bretton Woods en 1944. En effet, les USA, non contents de se tailler la part du lion dans le système financier mondial, vont aussi s’octroyer un quasi monopole de la culture du soja. Je signale qu’en matière d’alimentation animale le soja est la source de protéines de référence. C’est ainsi que les Européens n’auront de cesse de se défaire de cette dépendance phyto-protéique. Leur stratégie en la matière tiendra hélas le plus souvent du système D. Système au sein duquel les – très controversées – farines animales, du fait de leur évidente valeur protidique, trouveront toute leur place.
La deuxième date clé est le choc pétrolier de 1973. L’augmentation du prix des hydrocarbures incite les industriels du Royaume Uni à restreindre – voire à annuler – les (pourtant nécessaires) traitements thermiques et/ou chimiques des farines animales. Le maintien des marges… et de l’emploi sont à ce prix. Une pratique pourtant dénoncée comme potentiellement dangereuse dès le milieu des années 1970 par des experts du cru, en vain.
S’en suit une période obscure d’environ 10 ans qui voit l’apparition d’une neuropathie bovine inexpliquée dont le nombre de cas augmente avec le temps. Impossible de dire quand le phénomène s’amorce. Les animaux concernés seront régulièrement abattus et finiront en sauce à la menthe dans les assiettes des consommateurs, mais le plus souvent en farine dans les auges de leurs congénères. C’est ainsi que s’installe un effet boule de neige qui voit la toxicité des farines animales anglaises s’accroitre de manière démesurée avec le temps. La découverte de l’agent causal en avril 1986, la fameuse protéine prion, ne changera pas vraiment la donne.
Ce n’est qu’en juin 1988 que la culpabilité des farines animales est enfin admise par les autorités britanniques. Elles décident donc derechef d’en interdire l’usage. Mais sans donner plus de directives quant à leur devenir. Les acteurs de cette filière privatisée de nécro-recyclage se retrouvèrent donc livrés à eux-mêmes avec des stocks croissants de produits à haut risque. Qu’à cela ne tienne, en cas de tiédeur législative, force reste à la loi… du marché. Ainsi, confrontés à cette soudaine baisse de la demande intérieure, certains décident de fourguer leur daube, en douce et à prix réduit, là où on n’a pas encore eu le temps d’en interdire le commerce. La grande braderie prionique, intracommunautaire puis mondiale, peut commencer. Elle durera 10 ans.
« Mais il est bien lent le temps de la loi, il est plus rapide le temps des marchands. »
Pendant ce temps, donc, de l’autre côté de la Manche, les autres pays européens s’apprêtent à légiférer dans le même sens… chacun à son rythme.
Ainsi en France, pays des lignes Maginot et des nuages de Tchernobyl qui passent à côté, l’interdiction de nourrir les vaches avec l’ersatz entrera en vigueur un an plus tard, soit en juillet 1989. Rappelons quand même que la loi française en la matière était censée nous éviter cet Azincourt spongiforme : les restrictions à l’import sont telles, à l’époque, qu’il est théoriquement impossible que des farines animales anglaises traversent le channel. En fait, ce commerce discutable est régi par le tandem « Interdiction / Dérogation », un genre de schizophrénie législative qui signifie que c’est rigoureusement interdit, mais pas tout le temps et sous certaines conditions. Les responsables des ministères concernés (agriculture, douanes) ne furent pas plus troublés que ça devant l’accroissement sensible des demandes de dérogations dès la fin de l’année 1987. Lesquelles furent accordées avec une parcimonie toute relative et beaucoup de recommandations à l’intention du mandant. A cela il faut ajouter la fameuse tolérance à l’écoulement des stocks existants, qui autorise l’utilisation de tout ce qui a été acheté avant la date de l’interdiction. Le prion bovin britannique n’en demandait pas tant.
C’est dans ce contexte qu’il faut restituer cette allégation des industriels français de l’alimentation animale : « Nous n’avons jamais importé illégalement des farines animales. Nous avons toujours respecté la réglementation en vigueur ! ». C’est malheureusement vrai. Justement, c’est cette absence d’illégalité qui pose problème, que dis-je, qui fut le cœur du problème. On voit bien que c’est par ce vide juridique, doublé d’une aubaine économique, qui va de début 1988 à mi-1989, que le ver va entrer dans le fruit. Il est vrai que la chute du mur de Berlin en novembre 1989 ne va pas arranger les choses : elle accréditera cette idée qu’on a le droit de faire tout et n’importe quoi pourvu que ça soit inspiré de la doctrine des « vainqueurs ». Les empêcheurs de libre-échanger à tout crin n’auront plus qu’à raser les murs. L’entrée en vigueur du traité de Maastricht en 1992 en remettra une couche, le trafic des produits à risque « made in UK » y trouvera un second souffle.
« Le marché finira par s’assainir de lui-même »
Un ministre français, même pas de droite, lâchera plus tard cet aveu d’impuissance des pouvoirs publics : « En dépit d’une minorité de brebis galeuses, le marché [de l'alimentation animale] finira par s’assainir de lui-même ». Ah l’indécrottable couetude du libéral dans l’âme, qui a grandi avec cette idée que les écuries d’Augias sont auto-nettoyantes. La vache folle n’aura été, en définitive, qu’un premier avatar de dimension mondiale de la fameuse « main invisible du marché ». Une crise systémique avec la farine dans le rôle de l’argent…
Déjà Lehman Brothers perçait sous la vache folle.
En quoi la crise actuelle s’inscrit en filigrane de celle de la vache folle ?
En premier lieu, on remarque que ce sont les mêmes évènements historiques qui président aux destinées des deux crises. Passons vite sur les dates les plus évidentes : Bretton Woods en 1944 (naissance des FMI, Banque Mondiale, Gatt…) puis son changement de cap en 1971 (fin de la convertibilité du dollar en or) et bien sûr le choc pétrolier de 1973. Mais surtout, il y eut les fabuleuses années 1980, les « dix glorieuses idéologiques », les années Thatcher au Royaume Uni et Reagan aux États Unis. Car de même que la crise de la vache folle est consubstantielle du Thatchérisme, de même les Reaganomics portèrent au maximum le feu sous la marmite de la finance. Décennie qui s’achève en apothéose avec la mort du Soviétisme en 1989. Le vent de l’Histoire a rendu son verdict. Désormais sûr de son fait, le néo-libéralisme peut s’approprier le Monde.
Mais leur similitude est surtout d’ordre sémiologique : les mêmes mots pour les mêmes maux ? Ne parle-t-on pas de crédits à risque, d’actifs toxiques à propos de la crise actuelle ? Une histoire de grands corps malades qui se répète, en somme : au commencement est une phase de latence (très longue, en général) qui voit la toxicité d’une filière – alimentaire hier ou financière aujourd’hui – s’accroitre avec le temps. Puis arrive le temps où les produits ainsi frelatés voient leur valeur marchande, et la confiance qu’ils inspirent, menacées. On assiste alors à un « reconditionnement » de ces déchets toxiques : de même que les subprimes ont étés adossés à d’autres produits financiers de plus en plus complexes, de même les denrées britanniques à risque furent dissimulées dans des aliments complets. Opérations de détraçabilisation facilitées par l’existence de ces espaces de non-droit où la volonté politique n’ose pas mettre les pieds, avec pour conséquence une diffusion mondiale des produits foireux.
Une dernière question pour la route : quel est, aujourd’hui, le degré d’empoisonnement système financier mondial ? Je ne suis pas économiste, mais j’ai l’impression que depuis un an, la tendance en matière d’actifs toxiques est plutôt au statu-quo. Et je dirais, à cet égard, que la période actuelle est comparable aux années 1988-92 de la vache folle. Période où l’on sait la toxicité des produits, mais où rien d’efficace n’est mis en œuvre pour s’en prémunir de manière globale. Pour reprendre la métaphore de l’eau qui bout dans la marmite, je dirai que la thérapie a surtout consisté à rajouter de l’eau froide pour réduire l’ébullition, sans se préoccuper du feu en dessous. Si c’est le cas, on ne peut que se dire que le pire est devant nous. Et le pire, en équivalent vache folle, c’est la crise de 1996, celle où le grand public découvre que l’ESB est transmissible à l’Homme. C’est là que la crise entre en phase aigüe. La confiance des consommateurs est violemment entamée. Des pans entiers de la filière économique bovine vont disparaître, notamment au Royaume Uni. Je n’ose imaginer le scénario quand la crise actuelle entrera à son tour en phase aigüe. Car la crise de l’ESB ne toucha somme toute qu’un secteur restreint de l’économie. Alors qu’aujourd’hui, tous les secteurs de la finance et de l’économie réelle sont menacés. En outre, quand on pense que, dans le cas de la VF, la raison sanitaire a mis plus de 15 ans pour reprendre des couleurs… J’en viens à souhaiter, in fine, que l’analyse produite dans cet article soit entièrement à côté de la plaque.

Malheureusement, je pense que mon confrère voit juste… Tant que les politiques (de tous bords!) et les économistes ne comprendront pas que l’on ne peut à la fois planter l’arbre, en récolter les fruits et utiliser le bois pour le chauffage et la construction, nous irons dans le mur.

Chère (à tous les sens du terme…) société de consommation! La recherche du profit immédiat à tout prix causera notre perte.

Tout n’est pas encore perdu. Si seulement la crise actuelle pouvait secouer tous ces rêveurs éveillés! mais quand on voit qu’à peine un an après le fermeture de Lehman Brothers les bonus reviennent comme si de rien n’était, je ne peux m’empêcher d’être pessimiste…

Allez, secoue-toi mon vieux!! On peut encore redresser la barre…

La taxe carbone… après des semaines de débats confus, qui se souvient à quoi elle sert ? se demande Mediapart

Mediapart dit:Pas encore créée, la taxe carbone a déjà un échec à son actif : son plan com’. Le raté est magistral et consacré par la diffusion d’un sondage (TNS Sofres-Logica pour Europe1) jeudi 3 septembre selon lequel deux tiers des Français sont opposés à la création d’une taxe sur le carbone. Environ 67 % des sympathisants de gauche sont contre, ainsi que 63 % parmi ceux de droite, 69 % des sympathisants du MoDem et 60 % de ceux des Verts. Les foyers ouvriers y sont plus opposés (à 75%) que les cadres (57%). Un autre sondage, publié par l’UFC-Que choisir, donne 74% d’opposants à l’instauration d’une taxe sur le prix des carburants et des énergies de chauffage.

Résultat peu surprenant au regard du débat de ces dernières semaines: …

Pourtant, en juillet, les résultats de la conférence d’experts présidée par Rocard avaient été plutôt bien accueillis. Mais depuis, la cacophonie de l’exécutif et le défaut de pédagogie ont laissé sombrer la contribution climat énergie dans l’impopularité.

Cet échec – du gouvernement et des écologistes – à mener la bataille des idées autour de la taxe carbone, et à en expliquer les objectifs, a fait oublier les fondamentaux de ce projet de fiscalité écologique.
Curieusement, à trois mois de l’ouverture du sommet du climat de Copenhague, peu de personnes le rappellent, mais le but premier de la taxe carbone est de réduire les émissions de CO2. Comme l’explique l’économiste Christian Gollier, membre de la commission Rocard (retrouver ici son interview à Mediapart), l’augmentation du prix du carbone est une condition sine qua non pour atteindre l’objectif que s’est fixé la France de diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre. Pour y parvenir, la fiscalité du carbone a pour but de faire évoluer les comportements des acheteurs et des producteurs vers des produits moins émetteurs.

D’où l’importance de fixer un prix de départ pas trop faible de la tonne de CO2. Impératif qui avait conduit la commission Rocard à préconiser un prix de départ de 32 euros la tonne, compromis par rapport à un prix estimé être « écologiquement idéal» de 45 euros la tonne. Le prix désormais évoqué par le gouvernement est de 14 euros la tonne.

La taxe carbone portera sur le carburant des transports et les modes de chauffage. Selon le mécanisme prôné par la commission Rocard, elle devrait augmenter chaque année (d’environ 4% par an propose la fondation Nicolas-Hulot). Dans l’hypothèse d’une tonne de carbone à 32 euros la tonne, selon les calculs de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), elle coûterait 160 euros en moyenne par ménage la première année.

Une famille aisée en milieu rural pourrait acquitter plus de 300 euros quand un ménage modeste en ville ne paierait que de 55 euros. Concrètement, à 32 euros la tonne de CO2, la hausse serait de 7,7 centimes sur le litre d’essence sans plomb et de 8,5 centimes pour le gazole. En moyenne, un automobiliste paierait 80 euros de plus par an à la pompe. La facture de chauffage s’alourdirait de 15 % en moyenne.
Il semble néanmoins de plus en plus probable que le prix de départ du CO2 soit beaucoup plus faible, autour de 14 euros la tonne de CO2. Selon les estimations de l’Ademe, cela représenterait – avant compensation – en moyenne un coût d’environ 90 euros pour les ménages ruraux, et d’un peu moins de 80 euros pour les urbains.
…Selon le principe défendu par la fondation Nicolas-Hulot, grand promoteur de la taxe carbone, et promu par la commission Rocard, afin de ne pas être trop inégale, la taxe carbone doit être compensée par le versement aux ménages et/ou aux entreprises d’une somme forfaitaire. Le but est d’en corriger l’inéquité (car la taxe serait la même pour tous indépendamment de leurs revenus et donc proportionnellement plus coûteuse pour les plus modestes), et d’inciter les entreprises à réaliser les investissements leur permettant de «verdir» leur modèle de développement.

Avec ce remboursement, les consommateurs les plus vertueux ne perdraient pas d’argent voire en gagneraient, et les plus pollueurs au contraire débourseraient la différence.
Plusieurs scénarios de compensation sont actuellement à l’étude:
– Une restitution par le biais de l’abaissement du taux de cotisation sociale employeur et/ou employé (retraites ou maladie)

– Un forfait remboursé aux ménages sous la forme d’un crédit d’impôt. C’est une autre hypothèse aujourd’hui à l’étude par le gouvernement, qui concrètement ressemblerait aux remboursements perçus par les contribuables qui ont trop payé d’impôt.

Un «chèque vert», c’est-à-dire une forfait fléché vers des achats écologiques : abonnement aux transports en commun, bons d’achats de légumes bio…, c’est la proposition d’Europe Ecologie. L’idée est d’empêcher que l’argent touché au nom de la compensation de la taxe carbone serve à «consommer de la pollution» :

Indispensable outil de redistribution et condition de l’équité de la taxe carbone, le principe de compensation est aussi la clef de son acceptabilité sociale. Le sondage de l’UFC-Que choisir est éclairant sur le sujet : 52% des personnes interrogées sont favorables à la taxe carbone si les sommes sont entièrement redistribuées aux ménages par le biais d’un chèque. Les défavorables ne sont alors plus que 45%. Une majorité de Français deviennent favorables à la taxe carbone en cas de restitution totale.


URL source: http://www.mediapart.fr/journal/france/ … -quoi-elle

Liens:
[1] http://www.europe1.fr/Info/Actualite-Fr … rbone/(gid)/240235
[2] http://www.quechoisir.org/pages/communi … 2B5B6D.htm

Pour Eric Le Boucher Ségolène a raison à propos de la taxe carbone.

Extraits:

La taxe carbone est bel et bien anti-sociale. Si l’on veut que les comportements changent, il faut taxer sans compenser.
Haro sur Ségolène Royal après ses déclarations contre la taxe carbone qu’elle juge anti-sociale. On l’accuse de revirement (lors de la campagne présidentielle, elle a signé la chartre de Nicolas Hulot qui comprenait une telle taxe) et de populisme (ne réclame-t-elle pas comme alternative de taxer Total, ce qui est hors-sujet puisque cela ne réduirait en rien les émissions de CO² de la population). Ces critiques sont, certes, justifiées. Mme Royal a senti l’impopularité de cette mesure et elle tourne pour être portée par le vent.
Mais sur le fond, il reste qu’elle met le doigt là où çà fait mal: la taxe carbone est bel et bien «anti-sociale». Elle frappe les péri-urbains qui doivent prendre leur voiture tous les jours et plus encore les ruraux qui se chauffent au fuel, doivent posséder deux voitures par ménage et faire 15 ou 35 km quotidiens pour aller travailler. Elle est beaucoup plus indolore pour les habitants des centre-villes, qui se trouvent être les plus riches.

…pas sa répartition! Un ménage riche est moins touché, non seulement parce que ses équipements sont en général plus modernes et donc moins consommateurs, mais surtout parce que l’énergie représente une part plus faible dans l’ensemble de ses dépenses. Bref, CQFD, Mme Royal a raison. Et sans doute plus encore qu’elle le croit tant la ponction apparaît fortement inégalitaire: le pauvre est 4,5 fois plus touché que le riche.
Tout cela n’empêche pas de défendre le principe d’une taxe carbone sur lequel tout le monde s’accorde comme le meilleur moyen et le plus logique pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Mais il ne faut pas se voiler la face: socialement, cette taxe est fortement régressive. Annoncer comme certains à gauche que son montant sera redistribué aux faibles est un non-sens: si l’on veut que les comportements changent, il faut taxer sans compenser. N’est concevable qu’une compensation plus large ou sur un autre chapitre fiscal. Bref, la taxe carbone pousse à réviser la fiscalité d’ensemble pour trouver à compenser son caractère anti-social.
D’une façon générale, la déclaration de Mme Royal ne fait que souligner publiquement l’immense problème posé à la gauche: le social et l’écologie s’opposent par nature (si l’on peut se permettre). Les Mercedes neuves polluent moins que les vielles 207 et les riches peuvent facilement acheter plus cher «bio» quand les pauvres ont des budgets qui le leur interdisent. Les écologistes ont longuement nié ce biais anti-social de leurs politiques. Ils le reconnaissent aujourd’hui et répondent qu’il faut consommer moins. C’est le thème de « a décroissance».
Mais d’une part, les pauvres, en général, ne l’entendent pas de cette oreille. Ils veulent consommer plus! C’est vrai en France, c’est vrai au niveau international: l’Inde refuse de réduire ses émissions en expliquant qu’elle le fera une fois son rattrapage achevé, une fois atteint un niveau de vie équivalent à celui des Occidentaux. D’autre part, la décroissance est une politique contraire à l’ADN historique de la gauche «de progrès». S’en défaire pour adorer le «consommer moins» ne se fera pas sans douleur.
La droite aussi est partagée sur la taxe carbone comme sur l’écologie mais, pour elle, le problème est qu’il s’agit d’une taxe, encore une en France, dans le pays champion des prélèvements obligatoires. Plus ou moins d’autres baisses d’impôts, voilà le débat à droite. A gauche, il est beaucoup plus clivant, la contradiction vert-rose est fondamentale.



L’article entier

Sarkozy remet la taxe carbone aux frontières sur la table

En plein débat sur la taxe carbone, en France, le chef de l’Etat a répété qu’il allait proposer à ses partenaires européens d’instituer une taxe carbone aux frontières de l’UE.

Nicolas Sarkozy revient à la charge. En visite, jeudi 3 septembre, dans une usine de Caligny (Nord-Ouest), le président de la République a avancé une énième fois son idée de taxe carbone aux frontières. «Je demanderai à l’Europe une taxe carbone aux frontières», a-t-il déclaré devant les employés d’un équipementier automobile. «Ceux qui produisent sale doivent payer», a-t-il ajouté.

Mais cette mesure est loin de faire l’unanimité des Vingt-Sept. Lors des débats sur le paquet énergie-climat, en 2008, Paris avait déjà vainement tenté de faire adopter ce système (EurActiv.fr, 29/01/2008).

Proposée dès 2006 par le gouvernement de Dominique de Villepin, l’idée avait été reprise par Nicolas Sarkozy lors du Grenelle de l’Environnement. A l’époque, la Commission européenne était divisée sur le sujet. Alors que le commissaire au Commerce extérieur, le Britannique Peter Mandelson, s’y opposait fermement, le commissaire en charge de l’Industrie, Günter Verheugen, y était favorable au nom de la sauvegarde de la compétitivité de l’industrie européenne.

La dernière tentative –avortée– de la France pour réintroduire cette taxe dans le débat est d’ailleurs très récente. Le 24 juillet, lors d’un conseil informel des ministres européens en charge de l’Environnement à Aare (Suède), Berlin avait parlé de la taxe carbone aux frontières comme d’une «nouvelle forme d’éco-impérialisme». L’Allemagne, dont le commerce extérieur est florissant, y voit une menace direct de ses intérêts.

20 milliards d’euros

Quant à la présidence suédoise, elle refuse de prendre officiellement position sur le sujet, et préfère évoquer le développement des technologies vertes «pour encourager les échanges entre les pays européens». En revanche, elle se montre plus favorable à l’application d’une taxe carbone, telle qu’elle est actuellement discutée en France, dans tous les pays européens.

L’un des principaux arguments contre ce projet français consiste à dire que ce système ralentirait considérablement les négociations internationales en matière de climat. Nombreux sont ceux qui, à l’instar des Allemands ou des Danois, considèrent la mise en place d’un ajustement aux frontières avant la conférence de Copenhague comme un bâton pour se faire battre.

Un argument réfuté par Olivier Godard, chargé de cours à l’Ecole polytechnique et spécialiste de l’économie de l’environnement, qui affirme exactement le contraire. Pour lui, le mécanisme d’ajustement aux frontières permettrait de maintenir le système d’échange de quotas d’émissions de CO2. «L’ETS perdrait beaucoup de son efficacité sans une taxe aux frontières», explique-t-il, en évoquant notamment un prix du carbone trop bas.

Au contraire, le maintien des prix pourraient susciter une source de revenus qui permettrait de financer le transfert des technologies des pays du Nord vers ceux du Sud, et la mise en place des mécanismes de financement, prévus par la feuille de route de Bali. Selon le chercheur, ces opérations pourraient coûter à la France jusqu’à 20 milliards d’euros. «Or, ce n’est qu’avec l’argent de l’ETS que l’on financera les transferts», poursuit Olivier Godard.

Fin juin, un rapport publié conjointement par le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) et l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a confirmé la compatibilité d’une taxe aux frontières avec les règles de l’OMC, à condition qu’elle respecte certains critères, comme le respect de la non-discrimination entre les pays étrangers (EurActiv.fr, 01/07/2009).



FISCALITE DU CHANGEMENT CLIMATIQUE
Reportée deux fois, la communication de la Commission sur la fiscalité du changement climatique devrait finalement être présentée le 15 septembre prochain, a indiqué le commissaire aux Affaires économiques, Joaquín Almunia, lors d’une conférence de presse le 2 septembre.
Sans dévoiler le contenu précis du texte, le commissaire en a indiqué les quatres grands principes :
* “Tout le monde doit apporter sa contribution à la lutte contre le changement climatique, y compris les pays émergents”
* “Les pays en développement ne peuvent pas donner la même contribution que les pays industrialisés. Donc il faut prendre en considération les modalités qui permettent aux pays en développement d’apporter leur contribution.”
* “Le coût de la lutte contre le changement climatique ne devrait pas figurer simplement au budget du secteur public mais également s’appuyer sur des mécanismes de marché.”
* “Il faut procéder à une estimation de la contribution des pays développés aux pays en développement dans la lutte contre le changement climatique.”



Euractiv

Pour en revenir à l’article qui a initié le topic, au sujet des hydrates de méthane. C’est à peu prés le centre du (début du) livre Abysses de Frank Schatzing. Sauf que là, ce sont des bébètes qui bouffent la couche de glace qui recouvre les immenses gisements de méthane de la Mer du Nord.

Je suis presque étonné que les hard gamers présents ne l’aient pas cité, vu que ca a donné un jeu “Der Schwarm”, qui s’il ne casse pas des briques ou des parpaings, est fort sympathique.

Voilà, c’était ma modeste contribution au chhmilblick.

El comandante dit:Je n'ai pas vu ça dans le rapport, mais quand on veut tuer son chien, hein, on ne s'encombre pas de subtilités.


[Mode HS ON]
Dans la série je comprends avec trois mois de retard : c'est en lisant un article de rue89 que j'ai compris la référence à coucouche,
Sacré coucouche : allez va manger un yaourt! :lol:
[Mode HS OFF]

Pour GUILLAUME DUVAL ,rédacteur en chef d’Alternatives économiques la taxe carbone est nécessaire:

Guillaume Duval dit:
En juillet, lors de la remise du rapport Rocard, le consensus paraissait large en faveur d’une taxe carbone. Quelques semaines plus tard, il a visiblement disparu. Pourtant, la France a grand besoin de rendre sa fiscalité plus verte. Cette taxe n’est certes pas «la» solution au changement climatique. Face au défi de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre du pays d’ici quarante ans, elle n’est en effet qu’un des nombreux instruments qu’il faut mettre en œuvre. Des normes plus strictes, des règles d’urbanisme différentes ou le soutien à telle ou telle innovation seraient tout aussi susceptibles d’avoir des effets importants. De telles mesures agiraient en effet sur des investissements lourds, structurants, qui déterminent au moins autant le volume des émissions de carbone que le seul arbitrage du consommateur en train de comparer les prix au supermarché.
Il n’en reste pas moins que, dans des économies de marché décentralisées, il est utile et nécessaire de modifier les prix relatifs en intégrant progressivement aux coûts de production ceux dus au changement climatique, ignorés jusque-là. Surtout dans un pays comme la France qui est pour l’instant un des pays d’Europe qui taxe le moins l’énergie : selon la Commission européenne, ces taxes ne pèsent en effet que 1,4 % du PIB dans l’Hexagone, contre 1,8 % en moyenne dans l’Europe des Vingt-Sept et même 2,2 % au Danemark et en Suède, qui ne passent pas pour les pays les plus antisociaux de l’Union.
Non seulement ces taxes sont chez nous parmi les plus faibles, comme d’ailleurs l’ensemble de la fiscalité environnementale, mais la France est aussi un des pays où leur poids a le plus baissé ces dernières années. Pas étonnant dans ces conditions qu’un logement français consomme plus d’énergie qu’un logement danois, suédois ou norvégien, ni que nous figurions parmi les champions de l’étalement urbain (un Français occupe au sol deux fois plus de place qu’un Italien et 1,5 fois plus qu’un Anglais) et de l’usage individuel de la voiture.
Bref, sans être la solution miracle, une taxe carbone est nécessaire. Elle pose et posera bien sûr des problèmes redistributifs. Il faut y faire face en soutenant davantage le revenu des plus pauvres. Cette nouvelle taxe serait évidemment acceptée plus aisément si dans le même temps le gouvernement revenait sur les multiples dispositions fiscales qui profitent aux plus aisés… Mais en tout état de cause, ces problèmes ne doivent pas retarder une nouvelle fois la montée en puissance d’une fiscalité environnementale, après le fiasco de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), torpillée en 2001 par l’opposition des socialistes au projet présenté par Dominique Voynet, alors ministre de l’Environnement…


in Libé

Deux conceptions de l’écologie

Par Denis Sieffert, dans Politis

Extraits:

Ce n’est pas une découverte : le social et l’écologie ne font pas spontanément bon ménage. Longtemps, la gauche issue du marxisme a été rétive – c’est peu dire – aux questions d’environnement. L’emploi, les salaires, le « pouvoir d’achat » étaient au cœur de son action, à l’exclusion de toute autre préoccupation. Et le productivisme était sa religion. Il lui a fallu progressivement intégrer l’impératif du sauvetage de la planète face aux périls qui la menacent.
Hélas, l’affaire de la taxe carbone exacerbe de nouveau cette dualité, pour ne pas dire cet antagonisme : bobos contre archéos. Ce n’est pas la moindre de ses turpitudes. Car, depuis quelques années, les mentalités ont évolué, même si, peu ou prou, l’idée qu’il y a tout de même une hiérarchie dans l’urgence continue d’imprégner les esprits. Le mérite historique de cette prise de conscience revient principalement aux Verts. C’est en se définissant très tôt comme un mouvement de gauche… et en intégrant toujours le social à leur réflexion, qu’ils ont pu agir sur la culture collective. Plus modestement, Politis y a travaillé, aussi, depuis son origine. De l’autre côté, tout ce qui gravitait dans la sphère d’influence du parti communiste et de la CGT a eu bien du mal à considérer l’écologie comme autre chose qu’une lubie de « petits-bourgeois ». Là aussi, les choses ont progressivement changé

Il ne peut y avoir d’incitation à consommer moins, ni a fortiori d’obligation, sans redistribution. Sans une politique d’ensemble. C’est ici, à notre humble avis, que Nicolas Hulot – lequel avoue ne pas savoir se situer politiquement – fait erreur [1]. En soutenant coûte que coûte une taxe carbone mal ficelée et détournée de son objectif par un gouvernement de droite, il se comporte à peu près comme la gauche traditionnelle se comportait avec l’écologie il y a encore quelques années. En substance, il nous dit : « Appliquons immédiatement la taxe élaborée par le trio Rocard, Fillon, Sarkozy, et renvoyons à plus tard les promesses de compensation sociale. »

Aperçoit-il aujourd’hui l’ombre du commencement de tels projets dans le dispositif de la taxe carbone ? Voit-il poindre à l’horizon de vastes programmes de développement des transports publics pour les banlieusards ?
Pas besoin d’être très « politisé » pour comprendre que le gouvernement de M. Sarkozy n’est pas vraiment engagé dans cette voie. Toute sa politique va même exactement à l’opposé. Les services publics sont sacrifiés, et lorsqu’il est question de redistribution par l’impôt, c’est au profit des grosses fortunes. Voir le « bouclier fiscal ».
Ainsi conçue, avec, de surcroît, la forte présomption que cette taxe ne soit pas autre chose qu’une opération budgétaire pour récupérer le manque à gagner qui résulte de la suppression de la taxe professionnelle, il ne s’agira que d’un prélèvement de plus.
La question du prix de la tonne de carbone apparaît dans ces conditions presque secondaire. À 14 euros …, l’inefficacité écologique est à peu près garantie. C’est l’aveu que ce gouvernement se moque de l’écologie comme d’une guigne. À 34 euros…, c’est un peu moins inefficace, mais un peu plus injuste : les augmentations étant évidemment plus douloureuses pour les petits revenus. Cependant, l’urgence écologique est bien là.

Mais rien ne se fera sans un minimum de justice sociale, des compensations immédiates et des offres concrètes d’alternatives. Le drame, c’est que cette taxe carbone…est plutôt de nature à faire reculer une conscience écologique encore vacillante. Ce n’est pas tant qu’elle ranime le vieil antagonisme entre productivistes de gauche et écolos, mais elle creuse le fossé entre deux conceptions de l’écologie. L’une qui se dit apolitique… L’autre, ancrée à gauche.
Notes
[1] Libération du 7 septembre.


L’article complet

Bon,

Après les moults réponses aux travers des nombreux articles dont vous nous abreuvez. Une petite question à monsieur Ex lapin devenu birkenhead : peut on avoir une opinion plus explicite de votre part par rapport à l’écologie, la décroissance, disons le sans circonvolutions superfétatoires?

Je me doute un peu de votre réponse, mais dans le cas ou ce que je suppute serait vrai, donnez nous votre idée de la solution, si vous reconnaissez qu’il y a problème écologique à moyen terme… (sinon j’ai rien dit)

gracias,

En matière de religion je suis agnostique et ne supporte l’intégrisme.

ainsi soit-il et merci pour la réponse. :china:

Et tiraillé entre mon coté archéo et mon coté bobo.

tupak amaru dit:
des nombreux articles dont vous nous abreuvez. ,


Tu n'es pas le premier à me le reprocher (permet moi de continuer à te te tutoyer ...)

Soit: je ne posterai plus d'articles donnant différents points de vues, je ne posterai plus d'articles.