une France contre une autre?

Pour ce qui est de l’Europe, il me semble important que le processus d’élargissement fasse une pose.
Ces dernières années, nous avons associé un grand nombre de nouveaux pays quasi uniquement sur des valeurs économiques. On parle aussi de démocratie, mais force est de constater que la “surveillance” économique de Bruxelle est plus forte que la surveillance “démocratique”. On peut par exemple citer les gros problèmes de corruption en Roumanie ou encore la loi de lustration que nous ont concocté les jumeaux polonais… Les structures politiques s’indignent, mais ça ne va pas plus loin.

Donc, à mes yeux l’Europe de plus en plus grandit sur des questions économiques et ne prend pas ou peu le temps de parler de politique (depuis le non français personne, si ce n’est Angela Merkel depuis peu porte le projet politique) et de culture. Nul part je ne vois brandit un idéal culturel européen.
Dans le courrier international n° 855 (fin mars 2007, le cahier central était consacré à cette question : “ils rêvent d’une autre Europe”. On y trouve un article issu d’un discours de Win Wenders (cinéaste) dans lequel, il met justement en avant que pour construire l’Europe, la case culturelle est obligatoire. A ses yeux (et je suis de son avis), ce qui rassemble les individus, les peuples, les nations, c’est la culture. C’est le seul ciment capable de réunir. Ce n’est pas le rôle de l’économie en tout cas, d’autant plus lorsque cette dernière prone la concurence, la compétitivité, le dumping social, la loi de la finance…

Aussi, il est pour moi tant de stoper le processus d’élargissement sur des bases économiques et de prendre le temps de découvrir nos partenaires européens, de découvrir les peuples, les artistes, les écrivains… (et leurs auteurs de jeux aussi :wink: ), les modes de vie et les valeurs…

Pour te répondre Batteran, sur le sujet des niveaux de vie.
Je suis convaincu que nous (français, mais plus globalement pays industrialisés du G8) vivons au dessus de nos moyens (à l’échelle du monde).
Je ne vais pas parler de diminuer notre niveau de vie, tout simplement parce que ça ne fait réver personne, mais il devient urgent de questionner nos modes de vie, notre tendance à l’ultraconsommation notamment. Peut-on objectivement proposer (imposer?) ce modèle à l’échelle du monde ? Je ne le crois pas faute de ressources disponibles. Ou alors on fait le choix délibérer de laisser mourir des gens dans leur coin du monde.
Je pense qu’à la vue des effets de nos modes de vie sur la planète (problème écologique, “guerre” pour les ressources :pétroles, mineraie, métaux…, dérégulation de l’économie : comment ça se fait que ça coûte plus cher pour un malien de produire un poulet que pour une multinationale européenne d’exporter au Mali?..) il devient urgent de nous questionner et de construire une nouvelle approche des choses (et du bonheur notamment).

Nul part je ne vois brandit un idéal culturel européen.


Tiens, à ce propos, je suis du style: "la culture Européenne est entièrement à créer" De toutes pieces et au fur et à mesure, ou en s'inspirant du passé commun.

Parce que sinon, qu'est ce que c'est que cette "culture européenne" actuellement? Moi, je la vois sur le même principe que les nationalités: une culture qui emerge au travers de rassemblements au niveau de l'Europe. Et qui se "superpose" à celles existantes. Sans les remplacer pour autant.

Mais vrai, on a un peu de retard de ce coté. Mais ça devrait se faire tout seul avec quelques coups de pouce? (déjà, les rassemblements d'auteurs de jeu, etc, on un parfum européen, non? ^^)

[EDIT] Oui, concernant les problemes de niveau de vie, j'ai pas de réponses...
xavo dit:Je ne comprends pas à quoi cela sert de se sentir français. Quelqu'un m'explique ?


A quoi ça sert d'aider son prochain? Ca me rapporte combien?
Ce genre de réflexion rejoint ce que je disais sur le matérialisme, essayer d'expliquer à quelqu'un ce que c'est que de vivre en accord avec des valeurs qui transcendent la réalité quotidienne, c'est comme essayer d'expliquer à un aveugle de naissance ce que sont les couleurs.
Personne ne pourra te l'expliquer, il te manque trop de notions, trop de codes pour pouvoir l'appréhender. Rassure toi, on vit très bien sans ce genre de valeurs, l'honneur la fidélité, etc. ... ça ne t'empêchera pas d'avoir un cadis bien plein en passant à carrefour.

Maldo
Maldoror dit:
xavo dit:Je ne comprends pas à quoi cela sert de se sentir français. Quelqu'un m'explique ?

A quoi ça sert d'aider son prochain? Ca me rapporte combien?
Ce genre de réflexion rejoint ce que je disais sur le matérialisme, essayer d'expliquer à quelqu'un ce que c'est que de vivre en accord avec des valeurs qui transcendent la réalité quotidienne, c'est comme essayer d'expliquer à un aveugle de naissance ce que sont les couleurs.
Personne ne pourra te l'expliquer, il te manque trop de notions, trop de codes pour pouvoir l'appréhender. Rassure toi, on vit très bien sans ce genre de valeurs, l'honneur la fidélité, etc. ... ça ne t'empêchera pas d'avoir un cadis bien plein en passant à carrefour.
Maldo


Franchement Maldoror tes interventions ne sont ni constructives, ni argumentées, ni respectueuses. Autrement dit elles polluent la réflexion commune plus qu'autre chose. :pouicnul:
Ce serait bien que tu te mettes au diapason des débats politques de TT : chacun ses opinoins mais on argumente, on est ouvert et on essaye d'avancer ensemble.

"La laïcité est un constituant majeur de l’identité française. Mon adhésion totale à ce fondement fait que je me sens plus français que portugais ou italien par exemple pour qui la religion infuse davantage la société. "

Il est vrai qu’avant 1905, la France n’existait pas.

Apartenir à un pays, c’est prendre toute son histoire, pas seulement ce qui nous intéresse.
Vous vous sentez européen? Vous n’avez pas honte? C’est ensemble de peuple qui a conquis le monde? Etre citoyen du monde, c’est se sentr chinois et saoudien. Etre européen, c’est se sentir fier de son histoire et de sa culture, c’est vibrer à l’unisson avec des peuples qui partagent notre histoire, nos valeurs, même quand elles sont martiales, notre culture. Etre européen, c’est se dire: je suis fier d’être né ici, je ne voudrais vivre nulle part ailleurs. Sans cela on peut aimer l’europe, on peut être un homme de valeur, mais on ne peut pas se dire Européen. Un exemple: moi je suis écle, mais je refuse le tri sélectif, je roule en diésel, et je surconsomme parceque j’ai droit à ce que je peux m’offrir.

Le concept d’identité n’est pas un marché dans lequel on pioche ce qui nous arrange.

Quelquechose qu’il me semble important de souligner: pour moi il n’y a pas les bons qui se sentent appartenir à un peuple, à une patrie, et les mauvais, entendons nous bien. Tout est question d’expérience, et d’éducation aussi sans doute.
Cela ne me choque pas quelqu’un qui me dit qu’il se fout de son pays. Le jour où la majorité des gens de ce pays diront la même chose, ce pays n’existera plus en tant qu’entité cohérente, c’est tout, mais cela n’empêchera pas à mon sens les gens de vivre heureux.
On peut vivre heureux sans pays, sans dieu, mais de tout temps l’homme a eu besoin de valeur, et de repères.
J’ajouterai pour conclure qu’à l’heure de la mondialisation et d’une immigration qui n’a plus aucun caractère économique, le fait que certais sentent la culture qu’ils aiment menacée est tout à fait compréhensible. Et les réponses que j’ai pu lire ici ne feront que les conforter dans leur choix.

La question à se poser en 2007 n’est plus l’identité à quoi ça sert, mais plutôt: les français ont demandé plus d’identité, pourquoi, et surtout comment faire pour répondre à leur demande.

maldo dit:La question à se poser en 2007 n'est plus l'identité à quoi ça sert, mais plutôt: les français ont demandé plus d'identité, pourquoi, et surtout comment faire pour répondre à leur demande.

Ca ne veut rien dire "demander plus d'identité", mais alors rien du tout.
Par contre, il est évident qu'une partie des français (partie difficile à quantifier) s'interroge sur les questions d'identité. Ils s'interrogent notamment parce qu'à l'heure de la mondialisation des échanges (je ne parle pas d'échanges économiques) notre culture se trouve face à d'autres cultures, face à d'autres modes de vie.
La question est donc de savoir si on se replie sur soit (réflexe protectioniste et réactionnaire qui ne mène à rien car une culture se repliant sur elle-même est vouée à mourir) ou à s'ouvrir. S'ouvrir ce n'est pas laisser la culture de l'autre nous supplanter, mais bien chercher à comprendre comment l'autre vie et de ce fait questionner sa propre culture pour créer quelque chose de neuf.
Maintenant soit, une partie des français ne sont pas à l'aise face à ces cultures différentes. Cela peut se comprendre, la peur de la nouveauté, de la différence ce n'est pas nouveau. C'est justement là que doit intervenir le politique, l'intellectuel, le scientifique, en montrant que l'étranger n'est pas le mal, qu'il existe des moyens de dialoguer et avant tout en permettant de découvrir et comprendre l'étranger. Mais c'est tellement mieux de jouer avec la peur (en tout cas, c'est tellement efficace sur le plan électoral, aussi bien à gauche qu'à droite).

Pour illustrer ça, une petite citation d'Abd Al Malik (chanteur français) :
"la suspission, c'est quand un homme à peur et que l'autre en face ne le rassure pas".
L'autre : c'est notamment le politique, le scientifique, l'intellectuel, en d'autres termes, celui qui sait.

maldo dit:
On peut vivre heureux sans pays, sans dieu, mais de tout temps l'homme a eu besoin de valeur, et de repères.

On est d'accord, la culture c'est ça, l'ensemble des valeurs, des repères permettant à une société d'exister en tant que telle.
Reste qu'à travers l'histoire, les valeurs, les repères et donc les sociétés n'ont eu cesse d'évoluer pour produire du neuf.
En allant vers un repli sur soit, on fait le choix délibéré de laisser mourir sa culture, ses valeurs. En faisant évoluer sa culture, on lui donne de la vie.
Pour en revenir aux tentations de l'UMP de ces derniers temps, en souhaitant définir plus ou moins arbitrairement la culture française, en voulant la figer dans le marbre, elle fait le choix de la mort culturelle. Maintenant, je dois bien dire que cela ne me fait pas peur, tout simplement parce que dans un pays comme le notre, où la production culturelle est particulièrement forte, ce n'est pas une politique réactionnaire qui parviendra à empécher l'évolution culturelle de notre pays.
maldo dit:Apartenir à un pays, c'est prendre toute son histoire, pas seulement ce qui nous intéresse.

A bon ?
Qui ici peut se targuer de connaître toute l'histoire de son pays ? Personne. On n'en connait que quelques morceaux parcelaires. Malgré 5 années d'étude en Histoire, je n'ai pas cette prétention.
De plus, on n'appartient pas à un pays. On est ce qu'on a bien envie d'être. Encore heureux, l'homme peut choisir, c'est l'éducation qui lui donne cette possibilité. Plus un homme est éduqué (je ne parle pas de niveau d'étude, rien à voir), plus il est libre.
L'histoire d'un pays, d'un peuple, n'est pas là pour nous imposer notre identité, mais constitue un guide, une piste de réflexion sur ce qu'on veut être et rien d'autre.
Si l'histoire devient un poids, on tombe dans l'aliénation, on est prisonnié des évènements du passé, sans jamais pouvoir créer sa propre histoire.
maldo dit:
J'ajouterai pour conclure qu'à l'heure de la mondialisation et d'une immigration qui n'a plus aucun caractère économique, le fait que certais sentent la culture qu'ils aiment menacée est tout à fait compréhensible. Et les réponses que j'ai pu lire ici ne feront que les conforter dans leur choix


Les immigrations actuelles sont avant tout économiques. Les types qui prennent des riques fou pour arriver en France, le font dans l'espoir d'une vie meilleur, dans l'espoir de trouver un travail leur permettant de vivre mieux et même d'envoyer de l'argent au pays pour faire vivre leur famille. Cette immigration est aussi politique, tout simplement parce que vivre dans des régimes dictatoriaux c'est quand même pas la fête.

Maintenant quelques questions :
1) Puisque tu sembles faire parti de ceux qui sentent la culture qu'ils aiment menacée (je me trompe peut-être, mais à te lire, c'est ce que je comprend), peux-tu me dire en quoi tu te sens menacé ?

2) Qu'as-tu lu ici qui ne ferait que te "conforter dans ce choix" ?




P.S. :
avant de balancer un post sur la réflexion que se posait Xavo, prend le soin de lire ce qu'il écrit et dit. A aucun moment sont "à quoi ça sert" n'a de lien avec un gain financier ou autre. Il parle d'utilité, ou plutôt "en quoi est-ce important" si tu préfères.
Keyian dit: les paroles d'une chanson de Brassens à coté de la plaque


Brassens, celui qui voyait dans la lutte contre le nazisme une affaire d'oncles qui préféraient ou les roasbeefs ou les teutons? :mrgreen:

Le chef a fait référence à un texte de Wim Wenders sur l’Europe.

Le voici:

Wim Wenders dit:
L’Europe a une âme, c’est sa culture

Assez d’économie et de politique ! Le cinéaste Wim Wenders exhorte les Européens à se réapproprier l’esprit et l’image qui font leur rayonnement. Extrait d’un discours prononcé à Berlin en novembre dernier.

“Qu’est-ce que l’Europe ?”
“Comment va l’Europe ?”

On pourrait dire que l’Europe est fucked, à l’état d’épave, foutue**, quand on repense au désastre de la Constitution, à l’influence politique réelle de l’Europe, au manque d’enthousiasme pour l’idée européenne dont ont fait preuve les citoyens ces derniers temps. Les Européens en ont jusque-là de l’Europe…
D’un autre côté, quand on l’observe de l’extérieur, l’Europe est le paradis sur terre, la Terre promise. Depuis deux mois, je l’observe de Chicago et de New York, de Tokyo et de Rio, d’Australie et du cœur de l’Afrique, du Congo, et, la semaine dernière, de Moscou.
Je vous le dis : de partout l’Europe paraît sous un jour différent, mais toujours comme un paradis, comme un rêve de l’humanité, un berceau de paix, de prospérité, de civilisation.
Ceux qui vivent en Europe depuis longtemps en sont fatigués. Ceux qui ne sont pas ici, qui vivent ailleurs, veulent nous rejoindre à tout prix.
Je peux me poser la me semble-t-elle aussi profane, triviale, presque ennuyeuse dèquestion : pourquoi l’Europe me paraît-elle si “sacrée” quand je la contemple de loin ? Et pourquoi s que j’y reviens ?
Quand j’étais jeune, je rêvais d’une Europe sans frontières. Aujourd’hui, je voyage ici et là, sans montrer mon passeport, en payant avec la même monnaie (même si son nom se prononce partout différemment). Mais où est passée mon émotion ?
Ici, à Berlin, je suis allemand, toujours, de tout mon cœur. Mais à peine arrive-t-on en Amérique qu’on ne dit plus que l’on vient d’Allemagne, de France ou d’ailleurs. On vient “d’Europe”, ou on y retourne. Pour les Américains, l’Europe est synonyme de culture, d’histoire, de style et de savoir-vivre*. C’est la seule chose qui les fasse se sentir étrangement inférieurs. Et de façon permanente.
Même depuis l’Asie et d’autres coins du monde, l’Europe est vue comme un foyer de l’histoire humaine, de la dignité et, oui, encore une fois : de la culture. L’Europe a bien une âme. Inutile d’en chercher une. Elle est déjà là. Ce n’est ni sa politique ni son économie. C’est d’abord sa culture.
Mais je suis inquiet. Pour ses citoyens comme pour le reste du monde, l’Europe apparaît toujours d’abord comme une puissance économique, dotée d’armes politiques et financières, jamais culturelles. L’Europe ne se bat pas sur le terrain de l’émotion ! Mais qui donc aime son pays pour sa politique ou son économie ? Personne !
A cent mètres d’ici, comme dans toutes les capitales européennes, se trouve un des showrooms de l’Union européenne. Qu’y voit-on ? Des cartes, des brochures, des guides économiques, des quantités de chiffres sur l’histoire européenne. Quel ennui ! Qui donc essaie-t-on d’atteindre ou d’ennuyer à mourir ?
Nous vivons à l’ère de l’image. Aujourd’hui, aucun domaine n’a autant de pouvoir que l’image. Les livres, les journaux, le théâtre… Rien ne rivalise avec le pouvoir de l’image animée du cinéma et de la télévision. Pourquoi aujourd’hui, en Europe comme ailleurs, “aller au cinéma” est-il synonyme de “voir un film américain” ? Parce que les Américains ont compris depuis longtemps ce qui émeut les gens, ce qui les fait rêver. Et ils ont mis en pratique ce savoir de manière radicale. Tout le “rêve américain” est une invention du cinéma dont le monde entier s’est mis à rêver. Il ne s’agit pas de discréditer cette idée, mais de poser la question : qui rêve du rêve européen ? Un exemple concret et récent me revient à l’esprit. Dans les deux prochains mois, près de 20 millions, 30 millions ou même 50 millions d’Européens vont aller voir le même film. Ça a commencé l’autre jour, dans toutes les émissions, dans tous les journaux, sur toutes les chaînes – j’ai fait le tour des chaînes européennes –, on parlait de la première d’un film à Londres. Vous l’avez probablement deviné, il s’agissait d’un James Bond, où le gentleman au service de Sa Majesté combat l’injustice et sauve le monde depuis près de quarante ans. Vous souvenez-vous de ce formidable Ecossais qui a incarné ce héros européen, sir Sean Connery ? Ou de cet Irlandais élégant et cultivé, Pierce Brosnan ?
Cette année, entre Noël et le jour de l’an, des millions d’Européens vont voir en même temps une espèce de petit gangster, qui ressemble, permettez-moi de le dire, à Vladimir Poutine comme deux gouttes d’eau. Ce nouveau James Bond est plus brutal et impitoyable. Que veut nous dire cette production américaine ?
D’accord, j’exagère peut-être, mais le cœur du problème n’en reste pas moins vrai : nos mythes ne nous appartiennent plus. Rien ne marque l’imaginaire contemporain aussi profondément et aussi durablement que le cinéma. Mais nous n’en avons plus le contrôle, il ne nous appartient plus. Nos propres inventions nous échappent.
Le cinéma européen existe – malgré tout ! – dans une cinquantaine de pays, mais les films européens n’ont plus le même poids. Les images de ce cinéma européen pourraient aider toute une nouvelle génération à se reconnaître, elles pourraient définir l’Europe, avec émotion, avec force et sur la durée. Ces films pourraient être le relais de la pensée européenne dans le monde, mais nous nous sommes laissé prendre cette arme des mains.
Je dis bien le mot “arme”, car les images sont les armes les plus puissantes du XXIe siècle. Il n’y aura pas de “conscience européenne”, pas d’émotion pour ce continent, pas de future identité européenne, pas de lien réel, tant que nous ne parviendrons pas à donner à voir nos propres mythes, notre histoire et nos sentiments.
L’Espagne n’a pas de meilleur ambassadeur que Pedro Almodóvar, la Grande-Bretagne que Ken Loach et la Pologne qu’Andrzej Wajda ou Roman Polanski. Bien qu’il soit mort depuis treize ans, Federico Fellini incarne toujours l’âme italienne. Voilà ce que fait le cinéma : il crée et donne forme à notre conscience de nous-mêmes et des autres ! Il crée une idée européenne, une volonté européenne, cette “âme” européenne dont tout le monde parle.
Mais regardez la place que nous accordons à notre trésor, quel rôle nous lui laissons dans la vie culturelle européenne, avec quelle négligence, aujourd’hui comme hier, la politique européenne traite le cinéma et la culture en général. Pourtant, c’est le ciment, la colle, qui soude les émotions européennes ! Tous ces pays qui se languissent de l’Europe, tous les nouveaux et les futurs pays membres de l’Est, auraient d’une part la possibilité de se présenter, de nous parler d’eux, de nous plaire, et pourraient d’autre part s’enthousiasmer pour l’idée européenne, pour l’âme européenne, si nous soutenions davantage nos ambassadeurs mutuels, si l’Europe voulait bien croire au pouvoir de l’image.
Nous faisons une grave erreur. Nous nous battons avec des armes politiques et économiques, mais pas avec nos émotions. A côté, dans le showroom de l’Europe, les cartes du monde les plus ennuyeuses sont accrochées aux murs pendant que, dans nos principales ambassades, dans les cinémas et à la télévision, les Etats-Unis, superpuissance de l’image, fascinent le public, y compris le public européen.
Cette jeune génération que l’on prive d’Europe adressera un jour d’amers reproches aux politiciens européens. “Pourquoi avez-vous laissé l’Europe devenir ennuyeuse ? Pourquoi n’avez-de pvous parlé que olitique, au lieu de nous montrer et de nous faire aimer notre beau continent ?”
L’Europe a une histoire culturelle, sa vie culturelle contemporaine, sa politique culturelle. C’est ce que George Soros appelle la “société ouverte”. Parce que l’Amérique, explique-t-il, a échoué ces derniers temps à incarner ses valeurs morales et politiques, l’Europe est aujourd’hui un modèle encore plus important aux yeux du monde.
Mais ce modèle est malade, il ne croit plus en la force de ses propres images ! La société ouverte, cher monsieur Soros, n’entraînera, n’enthousiasmera, n’inspirera personne tant qu’elle ne sera qu’une idée abstraite. Elle doit être rattachée à des émotions. Ces émotions européennes sont là devant nous, à portée de main, les citoyens n’attendent qu’elles, mais nous les laissons de côté et nous abandonnons le terrain de l’image au reste du monde.
J’espère que l’Europe prendra conscience avant qu’il ne soit trop tard de l’importance de ce champ de bataille que nous sommes sur le point d’abandonner sans résistance…

bertrand dit:Pourquoi s'arrêter à L'Europe dans ce monde de globalisation des échanges?


Pour moi la réponse est trés simple : je ne connais rien d'autre à l'exception du Maroc où je me suis senti en décalage.

Il est fort ce Bertrand :wink:

Maldoror dit:
xavo dit:Je ne comprends pas à quoi cela sert de se sentir français. Quelqu'un m'explique ?

A quoi ça sert d'aider son prochain? Ca me rapporte combien?
Ce genre de réflexion rejoint ce que je disais sur le matérialisme, essayer d'expliquer à quelqu'un ce que c'est que de vivre en accord avec des valeurs qui transcendent la réalité quotidienne, c'est comme essayer d'expliquer à un aveugle de naissance ce que sont les couleurs.

LeChef dit:P.S. :
avant de balancer un post sur la réflexion que se posait Xavo, prend le soin de lire ce qu'il écrit et dit. A aucun moment sont "à quoi ça sert" n'a de lien avec un gain financier ou autre. Il parle d'utilité, ou plutôt "en quoi est-ce important" si tu préfères.

C'est tout à fait cela. Je comprends mieux pourquoi je n'ai rien compris à ta réponse Maldo.
Maldoror dit:Personne ne pourra te l'expliquer, il te manque trop de notions, trop de codes pour pouvoir l'appréhender. Rassure toi, on vit très bien sans ce genre de valeurs, l'honneur la fidélité, etc. ... ça ne t'empêchera pas d'avoir un cadis bien plein en passant à carrefour.


Je pense que tu n'es pas à même de savoir ce que je peux comprendre et quel est mon bagage philosophique.

Mais ce qui est vraiment intéressant ce sont les valeurs que tu associes au fait de se sentir français : honneur, fidélité, ... etc. Que cache ce "etc" ? Pourquoi l'honneur et la fidélité ? Parles-tu d'honneur d'être français et de fidélité à la France ou d'autre chose ?

Sans compter ces autres valeurs que Maldoror mentionne

Maldoror dit:
Etre européen, c’est se sentir fier de son histoire et de sa culture, c’est vibrer à l’unisson avec des peuples qui partagent notre histoire, nos valeurs, même quand elles sont martiales, notre culture.
Etre européen, c’est se dire: je suis fier d’être né ici, je ne voudrais vivre nulle part ailleurs. Sans cela on peut aimer l’europe, on peut être un homme de valeur, mais on ne peut pas se dire Européen. Un exemple: moi je suis écle, mais je refuse le tri sélectif, je roule en diésel, et je surconsomme parceque j’ai droit à ce que je peux m’offrir.


Je n’arrive honnetement pas a comprendre le sens exacts que tu mets derriere ces mots et je ne veux pas ‘interepreter’…Peux-tu expliciter ??

Merci.

La question du patriotisme, “vertu des brutes” selon Wilde, est souvent délicate. Le sentiment d’appartenance à une nation s’affirme et s’étiole avec la perspective et la distance. Quand on vit loin de la France, on ne s’en sent pas moins français mais certainement plus cosmopolite. Les sentiments d’appartenance se multiplie. Citoyen du monde tout d’abord, mais cela reste vague et finalement peu porteur; c’est juste un peu plus conscience, après trois tours en avion, que le monde est vraiment petit et “qu’il est plein d’étrangers” comme disait Desproges.

A l’étranger, la première valeur qui me parle en tant que Français (dans tous les sens du terme) est d’abord la francophonie. Rien n’appelle plus l’attention qu’un francophone avec qui l’on a le sentiment de partager toute la trame de notre être qu’est langage, tout en ayant beaucoup de chose à apprendre l’un de l’autre, avec un sentiment de proximité réelle. Les blaireaux diront que c’est normal, puisque c’est la langue de la France. Et bien on apprend rapidement que le français n’appartient pas à la France et on conçoit toute l’absurdité gênante à s’esclaffer d’un accent québécois, bruxellois, genevois ou togolais. Ce qui est amusant avec la francophonie, c’est que le concept vu de l’extérieur, et ses émanations politiques, font parfaitement ringards, anti-anglophone tarte à la crème. Vécu au quotidien, c’est très vivant, pas exclusif des autres langues et cultures, au contraire. Probablement l’incarnation la plus concrète du sens de la diversité culturelle.
Ensuite vient incontestablement l’appartenance européenne et un sentiment de communauté historique notamment et surtout avec les nations de l’Europe occidentale : Belges, Allemands, Britanniques, Espagnols, Italiens, Néerlandais, etc. L’impression de bien se connaître au nom du passé, un peu quand on recroise un camarade de lycée quinze ans après. Et on a du mal à se sentir chauvin frachouillard, ça paraît même ridicule. Wenders le dit très justement : quand on est loin, on nous parle plus de l’Europe comme un tout (et comme un paradis - les gens sont prêts à prendre des risques mortels pour arriver chez nous) que comme un conglomérat de choses différentes.

Y a-t-il des moments de dérive démagogique intime où l’on est “fier d’être Français ?”. Ca arrive, pour les bonnes et les mauvaises raisons. Quand Zidane fait danser le ballon par-dessus la tête de Ronaldo et que vous êtes en Amérique du sud ou le football “do Brasiiiiiu” fait l’objet d’une vénération, un petit sourire parfaitement immérité s’accroche. Le 14 juillet, aussi idiot que cela puisse paraître, est une date très remarquée; les journaux publient des encarts sur ce que cela a signifié pour le monde, le moment est salué (bien plus qu’en France paradoxalement). Le pays peut aussi étonner le monde par son audace ou sa capacité à casser le moule - ce fut le cas sur la question de l’Irak, le financement de l’aide internationale, ce genre de choses. Rencontrer des gens qui ont fait leur études, souvent de belles études, en France - un facteur d’influence absolument primordial, ça marque à vie, il faut bien les accueillir.
Et puis il y a les moments de honte, le 21 avril, les replis conservateurs et identitaires frileux qui suscitent toujours - toujours - une totale incompréhension parce qu’aux yeux du monde, la France ce n’est pas ça (nos voisins immédiats européens ont évidemment une vision bien plus nuancée des choses).

Quand on est loin, on se rend compte que la France est un des quelques pays qui parle au monde, ou qui a cette prétention et qui l’assume, oscillant entre le ridicule et le grandiose, suscitant francophiles et francophobes. En ce sens notre identité est plus que cosmopolite ou mondialiste, elle est universaliste, et “se sentir spécifiquement français”, pour toutes ces raisons, déborde forcément les frontières de l’Hexagone.

Que je sache, il n’y a pas de ministère du patriotisme.
L’identité personnelle et collective est utile pour vivre en tant que personne ou en tant que groupe.

Dès le début, certains d’entre vous on mis en valeur la diversité culturelle française. Certes, mais c’est loin d’être une particularité française. Notre identité est précisément dans un certain mélange donné, différent d’un autre. Notre identité ne consiste pas en un mélange de n’importe quelle culture avec n’importe quelle autre. La culture française a une forte base latine, avec des composantes celtiques et germaniques importantes (plusieurs couches de plusieurs époques). On y trouve également des composantes minoritaires historiquement déterminantes, comme la présence ancienne d’une communauté juive nombreuse, du peuple basque, etc.
Donc, diversité, évidemment, mais pas n’importe laquelle. Beaucoup de pays peuvent dire que la diversité fait partie de leur identité ; en fait, seuls les pays en situation d’impasse ou d’isolat ne sont pas dans ce cas. Après, le mélange culturel qui fait la France peut changer au fil du temps, évidemment.

Ajoutons que l’intégration est un phénomène à double sens : il faut pour s’intégrer le vouloir et sentir aussi qu’on le peut. L’intégration des immigrés est le travail de ceux-ci, mais aussi de tous les Français qui doivent en les accueillant leur faire sentir que leur intégration est possible et acceptée. Là, un ministère peut jouer un rôle de facilitateur. Il peut aussi favoriser l’identification des immigrés à l’identité française en les aidant à faire l’acquisition de la langue française et de certains repères culturels par des cours pour primo-arrivants.

Juste pour savoir…

Comment jauger de l’influence et de l’importance de ces differentes strates/cultures pour definir mon identité “Française”…??

Pour ma part, en tant que lorrain, mon mode de vie s’approche -sur certains points- beaucoup plus de celui de mes voisins sarrois (avec qui nous partageons plus qu’une langue, mais aussi une gastronomie…) que de Bretons ou de Basques.

En effet, la culture française comme celle de tous les pays connaît de nombreuses variantes. En Lorraine, la dose germanique est renforcée par rapport aux autres. C’est une terre germanique, à la base, donc…

Il faut se garder de tenter de fixer une identité française idéale comme Charles Maurras qui n’admettait comme purement français qu’une certaine idée fondée sur les auteurs du Grand Siècle et un art de vivre plus social qu’autre chose.

Si je peux me permettre, mon cher Philippe, la question que je me pose apres t’avoir lu est :

“Pourquoi finalement ne serais-je pas plus allemand que Français, vu que je suis “peut-etre” plus proche d’un sarrois que d’autres Francais…”

Excellente question, et quelle est ta réponse ?

(au passage la question se pose pour l’identité suisse par exemple)

Bein justement !!!

Vu sous cette angle là je n’en sais rien.

Tu vas m’empecher de dormir toi cette nuit !!

d’un point de vue pratique, je suis Français car on me l’a enseigné. Je connais mieux l’histoire et les institutions de la France que celle de l’allemagne. J’essaie de me montrer digne de notions telle la fraternité etc…

mais finalement, tout cela resulte d’un apprentissage…

Alors ???

Peut etre qu’etre Français, c’est etre “eduqué” Français…

Fondamentalement, et après toute chose (langue, cuisine, religion), il y a une ligne en deça de laquelle tu as un passeport français et au-delà de laquelle il est allemand. “Etre né quelque part, c’est toujours un hasard”…
aintenant si tu te sentais plus Sarrois, deux possibilités : 1) tu déménages 2) tu montes un mouvement irrédentiste, et on se retrouve dans la situation du printemps des peuples…
Sinon tu regardes au-dessus et il y a le drapeau européen…